samedi 23 janvier 2010

Eux






Je pensais parler d'eux
dans les règles drastiques de la prosodie classique
dans le carcan de la rime et des pieds
dans les positions des pieds
des pas
des « je peux pas
mais je le fais quand même »
des danseurs apprentis
des larbins repentis
et je suis en train d'entendre un requiem...
Je pensais parler d'eux
dans la rigidité rassurante d'un cercueil capitonné
qu'ils n'eurent même pas
même pas d'eux deux
même pas de deux
tant leurs angoisses furent communicatives
à l'époque
et leur Génie évident
aujourd'hui.
Ils vécurent sous le poids d'un père
l'un sous le poids de sa présence
l'autre sous le poids de son absence
ils vécurent peu de temps
à l'aune de la vie commune
mais le temps est une chose élastique
– tout le monde le sait ! –
que l'on dilate sur les partitions
que l'on triture sur les tables de torture
de l'édition
le temps de l'oreille
les tons péchés à la mâture
de l'immature
et des fables du sommeil...
La fameuse « petite voix »
celle qui vrille le cerveau
comme une chignole
agitatrice
perforatrice
celle qui remplit le vide de l'existence
d'un univers parallèle inconnu de l'autre
et d'harmonies inexistantes aux mariages de nos synapses
comme d'un bûcher dont on se voulut relaps
de tout ce dont on fut apôtre
de nos bâtisses espagnoles
en terres d'inconstance
et des grandeurs insoupçonnables
dont s'enflèrent les vers et les phrases
musicales
des phases d'emphase
et des morceaux misérables
à l'achèvement lacrymal.

Je pensais parler d'eux
mais n'en trouvais pas l'entrée
simplement parce que ce sont eux qui ouvrent les portes
et que leurs clefs
sont soi faites de notes non à régler
soi construites d'une mélodie plus secrète
d'additions
d'addictions
de gros pansements sur leur cœur pas préhensile
panser
penser
sessile
Cécile
le français offre le vocabulaire du salto pour le pire acrobate...
Mais une chose m'intrigue :
pourquoi chambouler le monde et en être conscient au point de vouloir le quitter ?
On s'essouffle tous !
Les essoufflements de Mozart et de Rimbaud ont accouchés de mondes nouveaux.
Ces deux enfants prodiges
Ont propulsé le monde dans des dimensions nouvelles
on ne peut ne pas parler d'eux
on pourrait parler du monde sans eux
ces deux enfants du monde sont morts
dans un monde qui les ignore
mais celui-ci mourut plus sûrement qu'eux...
A ceux qui n'ont jamais écrit
qui ne savent pas l'emplâtre que l'on se pose
à graver par la plume
en faisant rouler des boules de billard
des lettres ou des notes
à ceux qui s'imaginent ces feignants de l'écriture
à ceux qui croient que l'art est facile
à ceux qui ne savent pas
à ceux qui ne parlent pas à ceux dont ils aiment les notes ou les mots
à ceux qui marchandent comme au temple dans la stupide certitude du présent
à ceux qui marchent sur les chemins de la réussite
à ceux qui oublient que Mozart écrivit leur messe de mort
à ceux qui oublient que Rimbaud écrivit la messe de leur vie
je ne me fais qu'écho de ces deux grands Génies
dont je me satisferais
d'un strapontin
entre eux-deux
au Paradis.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

MAGNIFIQUE

Anonyme a dit…

A TOI QUI…
SUBLIME

A…x