dimanche 30 juin 2019

Mercure



Le dernier soir de Juin dégorge et s'hémophile
en pleurant sa rousseur aux parasols en sève,
et des lapins posés dont on perdit le fil,
il n'est plus d'amoureux, non plus d'Adam ni d'Ève.

En retrait la marée, laisse au pouvoir le sel,
et la rouille annoncée se répand dans les airs ;
aux branches humectées comme aux bras les aisselles,
on sent le littoral inspirer nos déserts.

On sent la dune battre ainsi qu'un cœur urgent,
réclamant du bon sang qui ne saurait mentir ;
on sent de chaque essence un peu du vif-argent.

Le mercure ascendant rougeoie sur les martyrs
assumés d'un climat qui devient indigent,
mais le soir ici-bas me fascine et m'attire.

https://soundcloud.com/annaondu/mercure

dimanche 23 juin 2019

Écarte-les



De Quimper à Paris, j'étais écartelé
par un chemin de fer à moitié barbelé ;
les stations — gestation — m'accouchaient à la fin
sur quelque quai de gare aux différents parfums.

Car chaque quai de gare où je jetais ma clope,
avait de mes beautés ce que mes vers éclopent :
un pied donné contre une main finistérienne,
un sourire aérien dans l'ombre parisienne.

Écarte-les d'emblée tes pauvres souvenirs !
Ils sont tous alignés, les dolmens et menhirs,
en ligne un peu brisée par leur chemin de pierre.

Écoute en leur écho leur Art et leurs manières,
assume enfin ta vie, j'en suis tout martelé !
De Quimper à Paris, j'étais écartelé

https://soundcloud.com/annaondu/ecarte-les

samedi 22 juin 2019

Tanka bleu



Je me le sens bleu
Quand quelque part vers le Nord
La côte est d'azur
Et qu'au lieu dit d'Aliénor
On veut Mathilde et Bayeux

mardi 11 juin 2019

Les vers du Gris





Il pleut sur la dune et mes yeux l'égouttent
en pleurant du sable et de l'encre noire,
un orage est fort à ceux qui l'écoutent
et Delacroix cocher, s'en remet à Renoir.

Un éclair alors en rayant la toile,
impose un peu d'or à ces vers du gris ;
j'ai parlé d'un cube à ceux qui l'étoilent,
à Pablo Picasso j'ai préféré Juan Gris.

Quoiqu'on en servit l'abus des nuances,
entre noir et blanc sa vraie vérité,
cassée comme un œuf empli d'influences,
est de Malevitch et de Soulage héritée.

Des nuages lourds aux ventres gonflés
me font cet effet d'un chrome sanguin ;
s'attelle à la tâche un lien boursouflé
réduisant sa fadeur de Van Gogh à Gauguin.

https://soundcloud.com/annaondu/les-vers-du-gris?

dimanche 9 juin 2019

Carmen



Si « poème » en latin — je crois — se dit Carmen,
on pourrait faire aussi de la rime un baiser,
de mes rejets la source où le grand-écart mène...

On pourrait se projeter sur la rive apaisée
qui de l'Île Saint-Louis put se servir de scène,
et de la guerre oubliée du génie de Bizet...

Que le scandale éclate à Paris en brillant,
Carmen est le moment dictant que je m'y mette,
afin que tout s'embrase et s'embrasse en criant
— lorsqu'une idée me vient, je gratte une allumette :

À chaque éclair un feu, puis à chaque lumière
un reflet de tes yeux ; de la courbe première
où je m'étends un peu, ta bouche est cette ornière
en laquelle on vit mieux, sans langue et sans manières.

https://soundcloud.com/annaondu/carmen

mercredi 5 juin 2019

Damascus



C'est la fleur aux fusils, à ses kalachnikov,
ouvertement offerte au viol en son pistil
— à ça la confusion Zaoum et Klebnikhov !

En ceci de cela, le poison qu'on instille
au cœur atomisé d'un peuple en making-off,
agit sans tremblements comme au cœur de la ville.

Il ne nous reste alors en scierie que déboires,
et d'eux quelques copeaux de civilisation
balayés par la guerre et l'adieu de l'espoir,
enrayés par un Monde en décomposition.

Découpée, découpée, la fleur du Proche-Orient !
Cendres dispersées façon puzzl'à Dasmascus !
Ton fantôme accueilli dans la mort en riant
subit, fleur épanouie, le sort d'un hibiscus.

https://soundcloud.com/annaondu/damascus

lundi 3 juin 2019

Tanka gris



Ce que la mer cure
En un geste vif, argent
fonds voire illusions
Sont dans l'abysse insondable
Où sombre une âme éthérée.