samedi 23 décembre 2017

Aventurine




J'ai galvaudé des étalons de démesure
à m'empresser vers ton regard hallucinant,
vers cet éther dûment mêlé d'or et d'azur,
aux lents reflets dont j'allais prêtre en ruminant.

J'ai liquéfié dans leur formule un peu de moi,
de la fée verte et Salomon sa clavicule*,
aimant roder sur la verdeur de ton émoi,
pour mieux sauter, là fallait-il que je recule...

Un océan s'est écoulé de tes yeux tristes,
un temps sans fin, sans foi ni loi ni fond ni faim,
mais leur éclat d'obus de chlore et d'améthyste
obtint raison de mon esprit dès lors défunt.

L'aventurine a fait son job et l'ondée chut
sur Toi mon ange implorescent de son passé,
de ton parfum de fleur mouillée l'odeur m'échut
telle une peau cousue sur le revers d'abcès.

Des variétés de muscovite on sait la tienne :
elle est sanguine à la façon d'invertébrés
dont l'onde lymphe est au-delà de mes antiennes,
et dont l'accord hémocyanine est célébré.

J'ai cravaché ma peur servile en t 'épousant,
comme la roche affronte l'onde et son étreinte,
allant d'avant sans cesse et pourtant s'épuisant,
cédant à la durée de la chandelle éteinte.

Aussi, me suis-je dissolu dans tes humeurs
infiniment amarinées par l'eau de tes abysses
étouffant dans le fond, bien plus que des rumeurs,
on garde alors en bouche un goût de cannabis.

Ainsi charnu, fruit de l'oubli de soi,
il grouille en ma mémoire un flux de vers épais
comme une lampe d'Aladin que je reçois
sans le génie qui m'aurait pu laisser en paix.

La Poésie divague, alerte, écorne, embrume,
houleuse et souple, à la façon de ton bassin,
l'oscillation l'empresse et, pulpe de l'agrume,
amoncelle en baisers la pluie de son naissain.

Je me noie donc enfin dans ton vert d'eau de mer ;
orange est le cheveu, si laiteuse est la chair.
L'aventurine a tourné court et l'âme amère
appelle en tous mes sens un désir en jachère.


* "Selon une tradition juive, l'émeraude magique appelée Clavicule de Salomon, tombée du front de Lucifer lorsqu'il fut déchu sur terre, et symbolisant la Science Sacrée maudite parmi les hommes, fut un temps la propriété des Caïnites. Cette émeraude était le Bareket de Ruben Satanas, qui la donna à Lilith, première femme d'Adam avant de devenir celle de Caïn, lequel la lui reprit lorsqu'il voulut reconquérir le Paradis perdu par ses parents. Ce fut une des pierres précieuses du pectoral de Salomon, le "Urim et Thummim". Le Mage Simon la perdit contre Simon Pierre, qui la donna à Marc l’Évangéliste. Celui-ci ignorait que cette émeraude avait été donnée par Salomon à son architecte Hiram, en récompense de la construction du Temple de Dieu. C'est pour cette raison que l'émeraude était magique et qu'il y avait des caractères mystérieux gravés dessus : un message secret pour les initiés. Ces caractères, gravés comme des formules magiques, donnaient en réalité les indications pour retrouver l'un des trésors de Salomon et de la Reine de Saba. Ignorant tout cela, Marc partit en Égypte pour fonder l’Église d'Alexandrie, mais il fut étranglé par deux tueurs d'une secte gnostique, liée au Mage Simon, qui rapportèrent l'émeraude à Antioche. Plus tard, lorsque Basilide fut en possession de cette émeraude, il la transforma en gemme gnostique du genre Abrasax, et elle passa alors aux mains des hérétiques Caïnites, jusqu'à la conquête arabe d'Alexandrie en 641. Le chef arabe Amr ibn al-As donna l'émeraude à ses prêtres, qui en eurent la garde jusqu'au moment où deux commerçants vénitiens réussirent à s'en emparer, avec le corps de l'évangéliste Marc. Ils arrivèrent à Venise en 828. Puis on perdit la trace de la "Clavicule de Salomon", c'est-à-dire de l'émeraude magique... "(Wikipedia — https://fr.wikipedia.org/wiki/Caïnites)

samedi 16 décembre 2017

La Poésie ?

C'est un texte de chanson où se cacherait la musique...

Simoun



Je soufflais dans l'évent des plus grands cétacés,
dans les cordes tendues sur les arbres bronchiques,
et les voix d'outre-tombe étaient ma panacée
dans l'harmonie complexe où tout semble anarchique.

À chacun des couloirs est son étranglement
débouchant dans l'évier du bassin labyrinthe
où les hanches masquées d'ambitieux instruments,
jouent le fil mélodique où mes poumons s'éreintent.

En cessant d'embrasser d'absolues vocations,
j'ai laissé la paroles à des tons relatifs,
et j'en ouïs au passé l'obscure inspiration.

Je ne suis plus coupable et bien moins que fautif ;
un chemin s'est ouvert entre mes fondations.
Tout désert est porteur d'un mirage exhaustif.

jeudi 14 décembre 2017

Voilà qui me donne raison

Cela fait 1 mois 1/2 que j'ai quitté cette merde, on m'a dit que j'anticipais le mouvement des autres, et si c'était le cas ?
À lire/écouter absolument :

Les repentis de Facebook

L'apprentiss'âge



Les beautés mordorées des feuilles de l'automne
ont des mots la cambrure au vent qui les soulève,
et l'impression sépia d'un ancien scopitone
éveille en ma mémoire un vent mauvais élève.

Un fort mauvais sujet malgré sa majesté
posée sur le chevet des nuits que l'on dénoue
gordien, lorsque le temps scalpé, passé l'été,
noie son ambition fleuve au creux de nos genoux.

Plié, l'estampillé courrier du cœur moisi
s'est fait la malle et pire : il raconte une histoire
hantée par un fantôme aux sévices choisis,
conduisant les moutons du somme à l'abattoir.

Et l'automne hémophile alimente un vampire
accouché par le siège en égorgeant les jours ;
une amante aliénée ne vaut pas un empire,
un soleil en saignant m'apprend tout de l'amour.

On commence à mourir à la morte-saison,
lorsque les feux couverts indûment nous enivrent
avec un monoxyde et quelques déraisons
que le papier-carbone imprime en un mot : vivre.

Un mot fait de grands maux qu'il accumule en route,
et dont l'inéluctable et mortelle illusion
conduit tout un chacun sur les chemins du doute
où s'instille un cancer en deux, trois perfusions.

Si vivre est apprendre à souffrir en quelque sorte,
il est normal alors qu'on vieillisse en cynisme,
en regardant nos mues, continents qu'on emporte,
entre un jeune et un vieux le passage est un isthme.

lundi 11 décembre 2017

L'autre Tigre de Borges

"La proximité de la mer" est l'anthologie des poèmes traduits de Jorge Luis Borges au sein de laquelle je me plonge hasardeusement depuis plusieurs mois déjà.
J'y découvre avec étonnement, peu à peu, l'étrange identité littéraire avec mon écriture, où je puise un renforcement salvateur quant aux choix délibérément marginaux de cette dernière, à l'aune évidente instillée par les milieux intellectuels français, d'une poésie qui s'est coupée de son public.
À la découverte inopinée de son texte intitulé "L'autre tigre", il m'est apparu qu'outre une analogie de forme, il y avait dans la profondeur de cette métaphore une assez grande familiarité de pensée, voire un troublant mimétisme en l'utilisation d'un tel exemple — issu d'une lecture préalable en mon cas d'un essai de Barjavel.
Il en résulte au-delà de ma surprise, une conviction puissante animant ma revendication de cette ellipse à vrai dire incomprise, et malmenée par une insuffisante imagination chez ceux et celles usant d'un degré d'interprétation par trop prosaïque.
Afin d'illustrer mon propos, voici ce texte (ici traduit par l'excellente Alina Reyes) :

L'autre tigre

And the craft that createth a semblance
Morris, Sigurd the Volsung (1876)



Je pense à un tigre. La pénombre exalte

La vaste Bibliothèque laborieuse

Et semble éloigner les étagères ;

Fort, innocent, sanglant et nouveau,

Il ira par sa forêt et son matin

Et marquera sa trace dans la limoneuse

Rive d’un fleuve dont il ignore le nom

(Dans son monde il n’y a ni noms ni passé

Ni avenir, seulement un instant certain)

Et franchira les barbares distances

Et humera dans le labyrinthe tressé

Des odeurs l’odeur de l’aube

Et l’odeur délectable du gros gibier.

Entre les raies de bambou je déchiffre

Ses raies et pressens l’ossature,

Sous la peau splendide qui vibre.

En vain s’interposent les convexes

Mers et les déserts de la planète ;

Depuis cette maison d’un lointain port

D’Amérique du Sud, je te suis et te rêve,

Oh tigre des rives du Gange.

Le soir se répand dans mon âme et je réfléchis

Que le tigre vocatif de mon poème

Est un tigre de symboles et d’ombres,

Une série de tropes littéraires

Et de souvenirs de l’encyclopédie

Et non le tigre fatal, le funeste bijou

Qui, sous le soleil ou la lune variante,

Va, accomplissant à Sumatra ou au Bengale

Sa routine d’amour, de loisir et de mort.

Au tigre des symboles j’ai opposé

Le véritable, celui qui a le sang chaud,

Celui qui décime la tribu des buffles

Et aujourd’hui, 3 août 1959,

Allonge dans la prairie une ombre

Calme, mais déjà le fait de le nommer

Et de conjecturer sa condition

Le fait fiction de l’art et non vivante

Créature, de celles qui marchent par la terre.



Nous chercherons un troisième tigre. Celui-ci

Sera comme les autres une forme

De mon rêve, un système de mots

Humains et non le tigre vertébré

Qui, au-delà des mythologies,

Foule la terre. Je le sais bien, mais quelque chose

M’impose cette aventure indéfinie

Insensée et ancienne, et je persévère

À chercher tout le temps du soir

L’autre tigre, celui qui n’est pas dans le poème.


Jorge Luis Borges

(http://journal.alinareyes.net/2016/01/14/lautre-tigre-par-jorge-luis-borges-traduction-alina-reyes/)


dimanche 10 décembre 2017

Point de vue partagé


"Dans un poème ou dans un conte, le sens n'importe guère ; ce qui importe, c'est ce que créent dans l'esprit du lecteur telles ou telles paroles dites dans tel ordre ou selon telle cadence."

Jorge Luis Borges

Héroïne



Un être éclaboussant de sa lumière ambiante
un pan de ma rétine, est parvenu sans mal
à crever l'écheveau fourbu des fils d'amiante,
auquel il m'incombait d'en délier l'animal.

Et sous la roue bleutée du fond de ses ocelles,
où l'océan frémit du moindre souffle au cœur,
ondulait par instant le palpitant de celle
allant buvant le flot des vers qui font liqueur.

Au sérum inutile issu des sangs bouillis
par l'effusion subite ainsi des sentiments,
j'ajouterais la foi pour finir en bouillie.

J'ajouterais l'Amour extrait du jus d'amants
mis à l'amende douce avec mes gribouillis,
J'ajouterais l'éclat qu'il donne à mon roman.

lundi 4 décembre 2017

Quelques rappels d'usage

Salut tout le monde !
Je viens de publier deux nouvelles critiques ciné ici :
http://musicologis.blogspot.fr/
En effet, depuis mon blog principal d'où vous êtes en train de lire ces mots, vous pouvez accéder à ses périphériques, blogs dans lesquels je me laisse aller au gré d'écritures aux formes diverses et variées. Il suffit pour cela de cliquer sur l'un des liens figurant sous la liste "Mes autres mots, ailleurs" se trouvant dans la marge ci-contre