samedi 31 octobre 2015

Du Poème absolu



Lorsque l'on vit d'avides frondes
où Goliath est un Minotaure,
et que ligués sont ceux qui grondent
– quand on sait que la ligue à tort –
on peut pleurer, on peut gémir
d'avoir un jour perdu le fil
du labyrinthe où peu se mirent
en quête inquiète et ludophile.

On peut se perdre aussi parfois
dans les méandres des neurones,
y laisser la part de sa foi
qui fait choir des plus prudents trônes,
y perdre son identité
dans d'infinies compromissions,
et finir d'un prémédité
meurtre accompli comme mission.

Lorsque l'on selle un destrier
qui n'est pas apte à ses montures,
on aura beau trier, trier,
les vers seront de la torture,
et la lunette ouverte au Monde
aura le goût de ne s'y fier
pas plus qu'aux illusions immondes
où l'on se trouve pétrifié.

Puisqu'il faut vivre et non survivre,
puisqu'il faut cesser de souffrir,
faire enfin provision de vivres
pour avoir un truc à s'offrir,
jetons nos peaux au pied du mur
– ce sont des parchemins trop lus –
et dans le souffle d'un murmure
un peu du Poème absolu.

mardi 27 octobre 2015

L'esthète de l'Art



Pour peu qu'on fut nourri sans mâle aux seins des Muses
et que leurs laits nous rient sous cape en s'essoufflant,
on prendrait sans répit ces airs époustouflants,
puisque de mal en pis sont ceux qu'un rien amuse !

On pendrait haut et court – Césaire m'en soit témoin –
ces êtres sans secours ne comprenant rien à l'Art,
rien de rien à l'Amour et tout à ses dollars,
On rendrait bien Zeymour à quelque rien que moins.

Mais ta lividité bénie par mes phalanges,
fait des divinités des souffles pernicieux,
dont la faiblesse innée s'ensouffre dans les cieux.

Et la roue moulinée par d'yeux le plus bel ange,
cligne autant qu'en tournée du tour des clavicules
d'épaules contournées que ton air véhicule.

dimanche 25 octobre 2015

Fond de tain



Si quelques étoiles obscures
sur la voie lactée de ton bras,
rendent à ce point insécure
un chemin vers ton Wonderbra,
si toute goutte de rousseur
dessine un secret labyrinthe
inscrit sur ta peau tout en sueur,
dont je me suis tagué l'empreinte,
emprunte alors tel un bel astre,
les rues de la carte du Tendre,
dont je te ferai le cadastre
en faisant semblant de t'attendre.

Or, ton sang ne faisant qu'un tour,
j'emplumerai d'un paon total,
ton sommeil des plus beaux atours
et ta beauté folle et létale
avec l'écorce ignifugée
des arbrisseaux aux cent écus,
puisque tu n'es que ce sujet
sortant enfin des sentis culs,
et balayant devant sa porte
les prétendants inopportuns,
à ta beauté rien ne s'apporte
– sinon mon miroir et son tain.

vendredi 23 octobre 2015

Sans retour




J'ai rêvé votre beauté lactescente
en un sirop de mots
si dilué qu'à ce point indécente
on soit au chalumeau
pour la forger de ces longues descentes
à vos courbes d'émaux,
puis de vos déliées incandescentes
en nos peaux d'animaux.

J'ai rêvé votre regard menthe-à-l'eau
pour me servir d'absinthe,
et les soudures en bon métallo',
de vos lèvres de sainte,
pour y sertir – comme on la met à l'eau –
la gemme offerte enceinte
aux féminités d'un bel étal haut
par ces phrases succinctes.

J'ai rêvé de vos prisons délicieuses
en votre pur ovale,
du visage aux expressions malicieuses
où les impairs se valent,
mais où le manque – en cigüe pernicieuse –
est un vide qu'avale
une rousseur automnale et précieuse
aux dormeurs de ton Val.

mardi 20 octobre 2015

L'Âme




L'âme-sœur, l'Âme, ne me vois-tu point venir ?
Je ne vois moi que le vain devin qui rougeoie,
mais ne vint point à l'heure éditée pour la Joie,
sur la route enfumée de nos absents avenirs.

L'âme-sœur, l'Âme dont l'éclaircie m'éblouit,
des fins, de fond, l'Âme es-tu hors de cause, ailleurs,
afin de nous transformer tous deux en meilleurs
nobles, lorsque le sang de la Terre a bleui ?

Je te cherche au gré du bruit liquide des eaux,
je te cherche avec la septième clef tâchée
par le raisin foulé des amours entachées

du bris du cœur, du bruit du vent dans les roseaux ;
l'âme-sœur, l'Âme, ne vois-tu rien me punir
à l'instar d'une étoile en Nova devenir ?

lundi 19 octobre 2015

Sey tout



Qui sait ce que c'est qu'enlacer
loin de Sées, sécession passée
des cécités embarrassées
de sentiments doux désossés ?

Moi, je ne sais quel gynécée
– loin des décès des bouts d'essai –
nécessitait jambe harassée
pour d'épicés vers qu'on pissait.

Quand tu m'adressais tes pensées,
j'esquissais incessant un sourire hérissé
d'en-dedans agacés par tes airs compassés,
et je laissais l'assaut des jument dépecées.

Je me lassais de mes lacets au cou passés ;
je repassais d'un fer rougi des tas d'abcès
j'avançais dans ces écrits crissés qu'embrassaient
les dévissés de mes demis-mots devisés,
pareils aux pales d'un moulin qui ravissait
les yeux qu'on crève en pal, jusqu'à celui de Sey.

samedi 17 octobre 2015

Miroir, ô mon beau miroir



Les poètes ne sont que des miroirs polis
reflétant la beauté si tant est qu'il y en ait,
avec leur langue acerbe et leur verbe impoli,
ils peuplent un grand vide en mots que tu connais.

Et si tu les connais, c'est parce qu'ils décrivent
ta silhouette ou ton geste, un tout de toi l'unique
individu soumis aux phrases qu'ils écrivent,
à l'onde dont Narcisse endossa la tunique.

Le poète est l'allégorie des frères Grimm :
comme eux il invente un conte et s'endort debout,
et chacun l'aime aussi pour ce dont il nous grime.

Le poète se cache en empruntant deux bouts,
et derrière le masque où fond le tain d'Alice,
il entonne à merveille un chant plein de malices.

jeudi 15 octobre 2015

Le cinquième Elément



à Ragnhild


Délus-je dans vos yeux quelques secrets aztèques ?
Ou transfuge, fus-je à ce point tourne-dos
que d'être retourné sur une grille à steack,
je cuisis à long feu sous un tel astre ado' ?

J'ai vos soleils marins comme ligne de fuite
et vos lignes de main pour parfait horizon,
j'ai l'eau de vos regards pour me servir de cuite,
qui maligne dévie vers cette humble oraison.

J'assemble en éléments l'ensemble qu'elle aimant,
fit de vous l'avatar de la Déesse-mer,
l'avatar que jamais à son laquais Léman,
le divin Océan n'associa à l'amer.

Dans les fluides splendeurs de votre atlante acmé,
j'ai vu luire et vouloir un désir insoumis,
j'ai su la croix portée par votre épaule, mais
de vos légèretés, le profond sens omis.

Et de votre embrasure où le Feu se complaît,
où l'Air et l'Eau mêlés à la Terre s'ajoutent,
j'enflerais volontiers votre orchestre complet
de nos doigts luttant pour le plaisir de leurs joutes.

jeudi 8 octobre 2015

Lis, rêve, erre anxieuse




À une normande passante,


Qui que tu sois, sois quitte d'écoute et tais-toi :
les collocations d'écholocation sont mues
par le hasard diffus que nos ondes nettoient.

Et nos carrefours sont aux paupières émues,
les larmes que la pluie pianote sur nos toits,
l'air pur qui guide le destin vers nos vraies mues.

Des rêves éveillés qui, quand on dort y sont,
rabotant de ma déraison l'indécent,
je garderai ton regard en tant qu'horizon,
je choisirai pour toi, des raisins l'un des sangs.

Sang coquin qui, coula d'un sunset oléin
sur la toile ayant vu tant de différents cieux,
sans qu'aucun ne brillât du bleu céruléen
de tes irrévérencieux indifférents yeux.

vendredi 2 octobre 2015

Encore un bel Orage (republication d'un texte de 2006)




À Arthur Rimbaud…

J'en ai ouvert des bateaux-livres,
                                           Bien démarrés...
Puisque chacun des bateaux livre
                                         Bien des marées,
Des passions, des envies de vivre,
                                          Des vers fumés...
De larmes, sans son bateau ivre,
                                             J'aurais coulé.

Que reste-t-il de nous après ?
                                            Posez-la vous
Cette question qui, à jamais,
                                       Nous rendra fous,
Comme de Verlaine il semblait...
                                           Tristes dégoûts
Que tous ces mots enchevêtraient
                                     Dans l'eau d'égouts.

Depuis vingt ans,
                  Que je n'ai plus dix-sept années,
La fleur aux dents,
                Ni plus le blond cheveux des blés,
Je fus mourant,
                             Et je voudrais ressusciter,
Rien qu'un instant,
                             Pour des tilleuls imaginés.

À ton roman !
                       À des dormeurs décérébrés !
Au val dormant...
                     L'herbe menue va s'en froisser,
Comme le vent
                  De tes grands souffles sur papier,
Toujours coulants
             Comme un bateau dans l'eau fermée.

La peur d'écrire un texte comme celui-ci
Est manifeste. Aux larmes, citoyens d'ici !
A ce seigneur, trafiquant d'arme en Éthiopie !
A ce seigneur, saignant des encres de nos vies !

A ce génie ultime et grand de poésie !
A ce profond abîme et à ce cœur meurtri !
A cet écho infime qu'il reste de lui,
Mais dont le son sublime est tout à l'infini.

Oh... Sont des promenades !
                                 Au pays de l'absente...
De tristes escalades
                             Qui se font en descente,
Nul mot n'est la parade,
                               A ces chutes bruyantes,
Mais juste l'estocade
                             Aux passions dévorantes.

Alors... Les bateaux sages...
                                  On n'en a rien à faire !
Et pour les vrais voyages,
                               C'est lui que je préfère !
Encore un bel orage !
                                     Encore un bel éclair !
Encore un beau naufrage !
                         En corps Rimbaud, ses vers.

Chinoiseries




C'est comme en soufflerie quand on naît cantonnais :
on pousse deux bancs – boue qui bouge avec le vent –
contre des fourberies quand on est cantonné
au plus mauvais rôle, ode au printemps du Levant ;
puis on s'échine en vain quant au nez qu'entonnaient
en trompette un orchestre aux chœurs mu par l'avent.

Et ce que sing a poor pour lonesome cowboy,
résonne à mes tympans (explosions de Tianjin)
comme les sanglots longs issus de « Little Boy »
dans le Japon qui la guette en bouts de blue jean,
dans le monde qui l'envie yet named & destroy ;
où que Tchang aille, RG s'en vont pister la Chine.

Si je me suis moqué, Guy, de ces pets qui noient
dans l'histoire ampoulée (ce que le formol ose),
je boirai à la tienne – Amen ! - aux pékinois
décédés de l'envie de coller à Formose,
et de leur rêve humain sans la paix qui noua
leurs caveaux de laquais canardés d'ecchymoses.