lundi 24 février 2014

Le vent d'Ys

Hello Earth by Kate Bush on Grooveshark



Pont-Croix: église Notre-Dame de Roscudon


Du grand Clocher sable enflait le chant des corneilles ; 
le vent d'Ys, fort et doux, m'emplissait les poumons. 
Jamais je n'aurais plaint les morts que leurs corps n'aillent 
ailleurs qu'au cimetière où sans fouet mon pouls monte. 

J'arpentais l'attelage des portes cochères, 
le pavé granitique et les berges vaseuses, 
j'étais en mes Pont-Croix comme en farce cachère, 
comme enfant, comme en face aspergée d'eau gazeuse. 

Et ce crachin craché par les basses pressions 
succédait aux nubiles brillances de Pacques, 
dont l'effort contenu de solaire oppression, 
laissait place aux gradients des salines abaques. 

Or, d'un parfum subtil orchestrant ce concert, 
le vent d'Ys emplissait toutes mes alvéoles 
que la clope insidieuse eut pu vouer au cancer, 
mais que l'Air - ainsi Dieu - fit qu'il délave Eole ! 

Le grand Ciel jaune ouvrait ses bras à l'avenir 
et la terre ancestrale arborait mon passé, 
et que des chants j'ouïsse un son suave hennir, 
c'était d'être à cheval sur l'orgueil compassé. 

Un nuage annonçait le temps des amours grises. 
Sur Cécile-ex, ces cils exquis étincelaient 
comme des diamants sur du jais que le noir grise, 
les vagues d'émeraude hurlant : "évince-les !" 

Tels étaient les joyaux de Dahud, la Sirène, 
tels étaient les bâtis de la ville engloutie, 
tels étaient les jurons dont les flots rancirent haine, 
tel était son vent fou, lui son plus bel outil. 

En écho de l'étang d'où dit-on crie la Belle, 
sonne sur ma jeunesse un glas du clocher sable, 
enivrant ma détresse à grands coups de Lebel, 
de "feu" ceux que j'aimais - si j'en fus responsable... 

Je n'ai plus, comme avant, la profondeur de l'estuaire 
pour vaste perspective, et les nombreux printemps 
sont ceux que nos théorèmes de Thalès tuèrent. 
Je suis l'image déformée de mes vingt ans.



1 commentaire:

Anonyme a dit…

Que dire...
J'aime tant !