dimanche 19 août 2012

Karénine




J'ai suçoté des décibels
aspirés à la courte paille,
quand la promise était si belle
– petit chou gras, j'en fis ripaille –
et qu'une parure encorbelle
autant qu'une maison forclose,
aux fondements d'un corps qu'épellent
mes pétales de lettre éclose.

En l'autre siècle où quelque oncle eut
ces crûs mots dont je fus divin
– tel est du moins ce qu'on conclue
d'un court-jus dont je fis du vin –,
je passais outre les frontières
et j'écrivais tel un devin
les courbes de ma vie entière
sous leur caresse à l'écrivain.

Je m'embuais pour des toquades
(givre et chaleur font long ménage),
avant de porter l'estocade
j'étais par trop souvent en nage...
Mais dans l'infinie cavalcade
de mon pâle écheveau de traits,
restaient tapis en embuscade
les points finauds de mes attraits.

Et les versets – sanglots d'automne –
se déversaient en giboulées,
en cataracte, en pluies gloutonnes,
en trois-quatre actes déboulés,
sur d'héroïques palimpsestes
au parchemin peu chamboulé
par l'encre, en n'usant pas l'inceste
de l'ode et des mots, gris boulets.

A ces souvenirs d'outre-tombe
je viens bâtir un mausolée,
afin que dans mes catacombes
je puisse enfin m'en isoler,
comme un abri contre les bombes
et les regards marmoréens,
le charbon des blanches colombes
enflammé sur leur trente-et-un.

De rire Anna Arkadievna
fit tinter les canons du verbe,
le souvenir est un Etna
qui s'éteint sans besoin d'adverbe ;
pourtant sa lave est invasive
comme en bouche une lange acerbe
à la salive corrosive :
Belle étendue sur la lasse herbe.

Aucun commentaire: