mardi 31 décembre 2024

Chanson rimbaldienne



Quand la pluie tombe en rangs serrés tout nous transperce

et les premiers jours d’une année vite impétueuse

écouleront le sang d’un tonneau mis en perce


En goûtant au venin de mon araignée tueuse

au regard effarant d’une princesse perse

une attirance est une passion délictueuse


On pense intimement que nos pensées travaillent

il n’en est rien en fait le mariage a son ban

qui décide sa date arrêtée quoi que vaille

un jour qui se relève ou cette nuit tombant


Reste entre le désir et l'amour un fossé

minodant ta paupière un de mes vers miaulait

d’un regard hors atouts je m’était défaussé

j'ai violé les volets de tes beaux yeux violets

L'inespérance



Nous reposons sur l'intuition

d'une existence inespérée

l'Amour est une hésitation

le désir est dégénéré


Tout nous enjoint à l’escalade

en Bête à Saint-Chély-d’Apcher

mais tout nous prête à rigolade

alors qu’on en devient l’objet


L'espoir est un bouillon de maux

qu'il faut disperser à l'envi

pour en retirer les grumeaux

je n'ai pas besoin d’un devis


Bien écrire est un vrai combat

chaque mot de ma Poésie

garde le Nord à son compas

ceux que j’ai lu sont des sosies


Je me suis tant rêvé Rimbaud

que je crains d'incarner Verlaine

et si je kiffe tes reins beaux

les vues du sexe sont vers l’aine


En tête est un petit pays

qui cherche son indépendance

et sous la cendre à Pompeï

se trouve mon inespérance

lundi 30 décembre 2024

L'homme labyrinthe



Peindre une toile

ou réaliser un portrait

c'est extraire l'essence intime à l’être

afin d'en asperger le support

et Süskind n'est pas loin de la vérité dans son allégorie

du "Parfum" :

quelque chose est amoureusement criminel

en l'acte créateur au reflet pictural ou littéraire.

Il arrive heureusement que certains auteurs

(à la fois poètes et réalisateurs)

arrivent à ce point à décrire

une époque étant leur

qu’ensemble on suive enfin leurs géniaux leurres.

Ainsi

je serai le poète de la nouvelle effroyable

aliénante et démunie misère

à laquelle il me faudra parvenir

à pendre des mots

par la corde vocale au besoin.

J'ai rêvé de ces pendaisons

de crémaillères

où des funiculaires conduisent à la mort (organisée)

pour les simagrées d'une société

momifiée dans le dégoût d'elle-même

offerte en bouche aux miasmes

immondes et purulents de sa propre pourriture

éduquée par le verbe à la soumission carrée

du racialisme le plus sordide et le plus vain.

J'ai rêvé l'effondrement des cheminées de nos angoisses

un peu des pluies savonneuses dont on se lave à satiété

dans toutes les questions qui comptent.

Dis

dessine-moi un mouton !

C'est l'Aïd et je l'égorgerai.

Chaque homme est un labyrinthe

et plus il est intelligent

plus le labyrinthe est complexe

et peu d'entre ceux qui l'ont parcouru

sont parvenus à s'en issir.

Au bout de la Nuit

lorsque l'on écoute une belle musique

— à la façon de Satie —

tombe ainsi que la fin d'un second jour

une délicieuse sensation

celle de ne plus rien attendre de personne

et de résider dans un labyrinthe

une coquille de noix

prête à se faire broyer.

Soirée durant laquelle on s'escrime à ne rien faire

à trancher dans l'art au fil du rasoir

à raconter sa vie

pleine de trous à des passants-mémoire

extirpés d'un présent dépassé.

La nuit recouvre

assez souvent

les errements de chacun

c'est la raison pour laquelle on y trouve

un tas des musiciens les plus doués

les vendeurs de rêves les plus fous.

La nuit

c'est le temps des oiseaux aux pupilles énormes

et le moment des petits rats qui grouillent au Sol

ils en avaient perdu la clef.

Nous naviguons sur le radeau des villes

un peu comme des réfugiés d'un Eldorado

qui n'existe plus

que dans les prospectus

d'un libéralisme écervelé.

Les constructions de nos présents

sont les ruines que regardent déjà nos enfants

tout enveloppés de mensonges.

samedi 28 décembre 2024

Spleen et idéale



Tout peut s'écrire à coups de reins sans prévention

j'étais un être épris qui roulait dans sa couche

et qui s’en régalait sans nulle prétention


C'était un miel extra' qui coulait dans ma bouche

on avait pour le moins fait fi des conventions

plus tard on sentit que très froide était la douche


Au cœur de mon amie qui palpite en saignant

(sa chair est délicate et son fruit du plaisir)

— et pourtant ce marasme est un bon enseignant —

je dois bien la rançon de ce verbe à saisir


Un baiser qu'on dépose est le témoin d'un corps

et d’une histoire aussi : du Spleen on fit des halles

aux marchands du Temple et qui nous réclame encore

entre mes mains j'ai pris sa rondeur idéale

vendredi 27 décembre 2024

Du bout d'un ongle



Le désir assumé se trouve au bout d'un ongle

en posant la main sur ton sein comme un idiot

j’aperçus la couleur avec laquelle on jongle


Un rouge vermillon de feux pentaradiaux

de doigts fourmillants dont j’ai repeuplé ta jungle

et de grands cris saisis dans le poste à radio


Nous appelons Amour une idée du fantasme

un concept alarmé comme à l’armée l’on ment

pour s’en faire au final une idée de l’orgasme

au premier des baisers c'est un accouchement


J'étais un maori mais amoureux d'un sein

de ta beauté totem enivrant tous mes sens

un peu de ta folie bourdonnant en essaim

tatouage en spirale abreuvant mon essence

jeudi 26 décembre 2024

Le fruit du désir



Dans le fruit du désir est la graine amoureuse

et mes alexandrins décorant ta rousseur

égayaient de leurs sons ce qui mit l’âme heureuse


On peut chercher la pomme ou quelque autre douceur

il n’y a qu’empêcher l’originale et creuse

assonance à rimer dans cette encre à noirceurs


Éteignons de nos doigts les bougies du passé

chaque éphélide en toi dit le temps segmenté

j'ai gardé trente années le goût de tes baisers

ta beauté tant aimée que j’avais aimantée


Les fruits de ta passion ne sont pas cruciformes

et les clous de nos croix non plus quoi que l’on blâme

en réalité vraie ne sont pas uniformes

amour et sentiments sont les tranchants de l'âme

mercredi 25 décembre 2024

Rase compagne



La lame haute et l’âme hautaine

est-elle enfin celle qui ment

les larmes sont cette fontaine

où se nettoient les sentiments


Le désir a pris l'habitude

audacieuse à s'offrir un nid

dans un bois d’inexactitudes

où tout commence et tout finit


Sans plume il n'y a pas d'envol

un objectif inespéré

le pire est lorsque l’on convole

en relation désespérée


Nous hésitions sur un prénom

la vie s’ajoutait à l'enfer

hérité des années sans nom

ce dont nous n'avions su que faire


Écrire est un geste d'amour

où le corps en toute encre sombre

à la façon du troubadour

en équilibre sur son ombre


Oui nos passions bien moins que l'Art

ont débattu dans nos campagnes

en faisant croire aux canulars

où nous découvrons nos compagnes

mardi 24 décembre 2024

Notre-Dame



Quand j'étais jeune et j'étais beau

je courtisais mais maintenant

je ressemble à Quasimodo

je suis ingrat d'un seul tenant


Le clochard en sonnant les cloches

a trouvé son triste surnom

Notre-Dame en bat ses baloches

et la mise en Seine est sans nom


Le quartier du Marais s'enlise

et le métro de son regard

indique la station l'église

où nous avions fixé rencart


En cathédrale est le plaquage

en or durable est le lapin

mais de quoi sont faites les cages

où nous crevons soir et matin


J'aimerais briser le destin

comme une boule de cristal

à laquelle un triste intestin

plierait sans que rien ne s'installe


Et rendre à notre religion

Noël un véritable but

par-delà pays et régions

l'amour est un éclat début

lundi 23 décembre 2024

Rapacité



La nuit n'éteint que les passions

se libérant entre deux corps

oubliant l’imagination

qui scelle entre deux cœurs accord


Rien ne singe un amour autant

qu'un cheval à bride — abattu —

qu’une charogne au mauvais temps

sa chair aux petites vertus


Le fruit de nos nuits poétiques

est envahi par des nuées

dans cette vieille peau éthique

un don dont je suis dénué


Du cœur enfin je n'ai rien du

je n'ai pas besoin de devis

le lien que je n'ai pas perdu

c'est celui de ma fin de vie


Je voudrais inventer des mots

pour te parler de la beauté

car on ne peut décrire en gros

que ce dont on pourrait l’ôter


L'infini des pluies qui m'enserrent

est le sanglot long du poème

un rapace a pris dans ses serres

un vieux vers et tout ce que j'aime

samedi 21 décembre 2024

L'amour à vendre



Serre-toi contre moi quand la nuit va trop vite

en étant bien plus seul on fait moins le malin

l'affreux doute est-il un amoureux d'Aphrodite


Une épaule de fille est un lieu de câlins

la plage où l’on s’attarde à ce point qu’on l’habite

ici ton haleine a ce parfum d’air salin


J'ai mis dans ton corsage un morceau de ma vue

la nasse de ton corps est mon piège espéré

l'amour et ses moissons perdus de bévue

la courbe de tes reins fantasme oblitéré


Les coussins de mon cœur ont l'angle de tes seins

tout est beau de ta chair et le reste est abject

il y a l’argent sale évidemment malsain

quand l'amour est à vendre on n'est plus qu'un objet

vendredi 20 décembre 2024

Truelle



Tes pétales de lèvre ont le parfum des fleurs

engrainées sans raison dans l’intime rouage

au clitoris ému lorsque mon doigt l’effleure


En rêvant de ta peau comme on fait tatouage

en caressant l’épaule et ce sein persifleur

on devine aisément qu’on désire à tout âge


Oui l’âge et ma laideur en feront fuir encore

et pourtant j’anticipe une issue moins cruelle

en lisant mon délire à propos de ton corps

un peu de poésie construite à la truelle


On bâtit l’illusion sur quelques points communs

des plaisirs attendus de se sentir à cran

d’une verge une vulve et parfois d’une main

projeter son fantasme est rêver sur écran

jeudi 19 décembre 2024

Papillon de suie



J'ai tapoté du doigt tes courbes rebondies

celle aussi d’un dessin gravé par un tatoueur

et j’en ai fait le tour un doigt me répondit


« Quoique le sexe en ait l’argent n’a pas d’odeur

et la prostitution commence à ce midi »

la beauté de la Femme étouffe nos laideurs


Rare est la force échappant à la sujétion

le vice a bien saisi l’écrou que l’on desserre

un plaisir sexuel est une autosuggestion

chaque fruit de la nuit se déguste en dessert


Alors il faut croquer la pomme appeler Wilhelm Tell

en changeant la flèche d’Éros et son lent vol

échanger l’être et l’âtre est un péché mortel

l'amour est un papillon de suie qui s'envole

mercredi 18 décembre 2024

Sept fois huit



I


Finir est la jolie façon de commencer

j'écris pour repeupler le désert de ma vie

bruit du papier qu'on froisse et de l'âme altérée

le badge est là qui dit enfin touche à mon pote

on sait comment tout cela finit comme on sait

laissez-moi donc de folies l'espoir assouvi

parfois sous terre avec une mine atterrée

le fruit de nos passions se résume en compote



II


Il est bon que la Poésie nous trouble encore

rien ne justifiera jamais l'exploitation

l'amour de l'Art est-il un art de l'Amour

rien n'est plus aboutit qu'un échec en lumière

un Lucifer obscur un petit diable au score

et vous rencontrer là sans préméditation

vous prendre par la main sur des voies de labour

est vraiment retrouver la belle idée première



III


Rien n'est plus vain que de chercher à ne pas l'être

en ma désespérance est mon puits littéraire

on y puise on s’épuise on repeint le décor

et ce que je crée n'est qu'en ce que je crois

je fabrique et je forge un poème à la lettre

en martelant ce qui de plume itinéraire

est l'ombre imaginée de ma main sur ton corps

est le poids du désir où l’on porte sa croix



IV


La nuit sans privilège est l'espace où l'on rêve

vivre est se sacrifier pour un bien peu commun

survivre est éprouver l'accès vers un ailleurs

exister c'est se poser en opposition

durant l’éclipse en vrai l’obscurité fut brève

et passant d’un mari vers un vrai concubin

chaque engeance a l’humain dont elle est le bailleur

en cela peu m’importe à quelle position



V


Créer tout ce verbiage est un travail inouï

nos phrases sont des sons des leçons s'articulent

la parole au pinceau marque infiniment l'âme

au couteau sur la toile accrochant à tout prix

ton regard éblouissant dont on est tout ouïe

cette oreille absolue c’est ce diverticule

où l’image et le son sont tout ce que l’on blâme

et parfois on réclame et plus souvent l'on prie



VI


J'essaie de m'inventer des présents plus plaisants

si vivre est se poursuivre on en fait bien des tomes

un paquet de bouquins dégringole des cieux

dégouttant de mes mains c’est normal il a plu

fut-il mal ou bon j'eus l'heur en chemin faisant

de chopper ton sourire accrocher ton atome

ma nuit s'illumine à la clarté de tes yeux

tu me regretteras quand je ne serai plus



VII


Le désir est absent d'un futur idéal

l'intensité du noir est forte à l'équateur

une étoile est visible à cette latitude

et Saint-Ex a mis le point final à la ligne

un aurore est australe et parfois boréale

un baiser survolé c’est un vœu migrateur

et c’est pour ça qu’à présent j’en sais l’altitude

et que je pose à plat tous mes mots qui s'alignent

mardi 17 décembre 2024

Le verjus



Du bon vin j'en ai à Buzet

je sais que Baudelaire en avait abusé

beaucoup d’autres aussi

le désir est bien vain n'étant pas nourrissant

je pense à l'écriture à la façon d'un ver

(un enfant dort à l'insu des défaiseurs de vers)

un fruit noblement pourrissant

sur les coteaux de décembre en Alsace

où les vendanges tardives

agressées par botrytis

ont l’ambivalence absolue du Mal ou du Bien

quand le champignon tisse

une maladie qui rend meilleur

et qui tue.

Le cri vint

l'aigri vin

l'écrit vain

l'écrivain

le Gris vainc

sa partition du Noir au Blanc

du Pinot noir au Gewurtzraminer

il est toqué ce Tokay

qu’on nomme ici Pinot gris

parce qu’un des Césars

a fait planter le cépage en Hongrie

souris majeure et ramoneur

on avait le bon plant

nous avions tous ces arts

et le nom reste à quai.

J'enracine en Racine un serment de sa vigne

et si j’étais devin

mis en bouteille

à la façon de Paris

pas digne

enfin

de bouger d’un orteil

il me suffirait d’un signe

afin de changer son gabarit.

L'amour se greffe ailleurs en l'absence de place

et ce que la philo’ serra

parasite à ce point nos pensées

que l’alcool inutile

— à juste titre —

imbibe au plus profond

nos carcasses dépecées

dépensées

« Que sera sera »

distiller le passé fabrique un avenir

au moment de rajouter la glace

et l’épître

à l’évangile de Rais

quand on touche le fond

de la cuve où l’on a décuvé

d’incroyables cuvées.

La relation se cueille à la façon d'un fruit

— la pulpe acidulée de ses baisers

dégouttait de passion —

tout éclate

un grain de raisin

l’écrin de raison

qui nous maintient loin du bruit

loin de la dépression

près des endroits apaisés

dont nous psalmodions l’oraison.

La pluie qui nous recouvre

est à la fois l'espérance

et l'abandon de nos semailles

on échafaude avec des gueules de bois

qui se retrouvent sur la paille

avec un jus de raisin rance

inconnu des envieux.

Le crépuscule est accompagné de parfums merveilleux

la terre a transpiré

mais sa sueur est divine

et m’a bien inspiré

de petits bateaux ivres encombrent ma mémoire

encombrent mes grimoires

où j’entasse un paquet de mon pop-Art.

Et des leçons que j’eus

l'amour est un breuvage infect à la plupart

en cet alexandrin tirez donc le verjus.

lundi 16 décembre 2024

Concupiscence



Ne parlons plus d'amour et taisons nos désirs.

Entre mes mains qui se diffusent sur ton corps

il y a l'espoir insensé que ta beauté ne soit pas vaine

et que

par-delà les sillons de tes artères

et de tes veines

un peu du tout de tes courbes éphémères

à suivre.

On aime en faux-rythme

— un désastre —

un rythme des astres

et l'on ressent à celui de la pluie battante

un peu de la chaleur du corps dont la gravité s'assujettit

mais que l'expansion nous ôtât.

Puisque au tas vas la pierre

et que les petits ruisseaux

font de grandes rivières

et les soupes les soupières

et les boissons les boisseaux

nous naviguons dans l'ouate

et les cotons parentaux

jusqu'au moment du heurt

aux récifs pariétaux

sur lesquels nous fracassons

nos crânes à leur étau.

Les fruits

de nos concupiscences

ont pris le large

— il a trouvé sa fiancée

sur un autre littoral

et leur alliance est littérale —

à suivre

— Elle a croisé sur la route un beau garçon

qui lui a fait son cinéma

la jeunesse est admirable

et nous n'avons plus qu'à nous cacher.

Leur absolue fraîcheur éclate à la vie courante

insouciante enfin des courants contre

et des glaçons

des icebergs

isolés dans mon esprit.

Nos enfants deviendront des adultes

habillés du souvenir des petits qu'il nous fallait protéger

comme eux nos œuvres ne nous appartiennent plus

mais voguent vers d'insoupçonnables rencontres.

dimanche 15 décembre 2024

Publi-citer



Je n'écrirai pas ce soir.

Il ne faut pas écrire à chaque soir

ce serait publi-citer.

Ce soir

on écoutera le son des poètes qui m'hypnotisent

ils m'ont emporté dans le tourbillon de leur génie

dans l'épaisseur visqueuse assujettie

des poisseuses amours inspirantes

au bouche à bouche

ignifugées

réfugiées

des passions lentes

un peu comme un cancer

ou comme un capricorne

et qui trop pique

avec l'étiquette au col de l'utérus

afin d’éprouver la marque de Lilith

au fer rouge inscrit par les inquisiteurs de Salem.

Moi ?

Je n'écrirai pas ce soir.

Ou je ne ferai que répéter des choses entendues

publiquement correctes

en saluant les infirmes

abreuvant de ma salive un peu des pires atrophiés du bulbe

et refleurirai de mon langage

une déjà sainte entreprise

à la fleur du fusil

à l'ombre espérée d'une éclipse de lune adorée.

Je n'écrirai pas ce soir.

En laissant mes parfaits acolytes

à leurs diversions alcooliques

on sèmera des graines d'écrivains

dispersées au fil de l'intelligence

et poussant de tous les côtés littéraires

en bâtissant de leurs envies anticipées

ma guirlande lumineuse

au catalogue des fantasmes.

Enfin sur un sapin

se détacheront les boules de feu des fiancées

flambant neuves au détour d'un acte notarié

condamné

prêt à nourrir un petit bois de déceptions anéanties.

Je n'écrirai pas ce soir

il est celui des sombres clercs de notaires

il est celui des clercs obscurs

ils sombrent dans leurs écritures

et leurs publications

— puisque publiques —

offrent aux pauvres gens quelques "Oyez, oyez !"

dont se torchent les flammes amoureuses.

Aucune amoureuse ne me l'a demandé.

Sans amoureuse à quoi bon écrire ?

Être une étoile

à certaines est la fabuleuse combustion

dont le talent crée l'irrésistible éclat.

Lou la planète

Apollinaire était l'étoile

l'Iseult du temps triste et des averses

à Tristan les prévisions météo’

mais théologiques

et la cataracte affective

à laquelle nous rêvons secrètement.

Je n'écrirai pas ce soir

et d'autres pourront le faire à ma place.

Dégringolade



Nous sommes des petits moutons

perdus sur la banquise en fonte

un peu comme les blancs oursons

sous des noirs radiateurs en fonte


Effeuille un peu de tes secrets

tant que l’on est encor vivant

c’est si précieux je t’en sais gré

ce sont des sables émouvants


Je ne suis pas de ces gens bien

qui font leurs lits et leur vaisselle

et des bons vœux je sais combien

se font roulés sous les aisselles


Au milieu des ces fruits d'effet

la serre est dans la bousculade

on croit maîtriser le sujet

tout est dans la dégringolade


Être aimé c'est très important

quand la température augmente

aux vents mauvais nous apportant

dans les nations ce qui segmente


Et dans sa force émancipée

le charme de la décadence

imprime un temps précipité

celui de la dernière danse

samedi 14 décembre 2024

Poème obscur



La nuit s'étend comme un linceul

oublié sur un chantier nu

sur un terrain vague elle est seule

et son message est inconnu


La nuit s'étend sur l'avenir

un peu comme une main gantée

l’étranglant comme un souvenir

il lutte afin de résister


Je veux trouver des mots onctueux

pour mieux effacer ses soucis

malgré ce geste assez vertueux

la nuit tombe et le masque aussi


L'espoir est un paquet de vues

qu'il faut disperser à l'envi

le reste est un grand imprévu

que l’on appelle ainsi la vie


Le passé c'est de la poussière

ramassée d'un balais de mots

comme un éclat d’obus-sorcière

un chas passé par un chameau


Ne dites rien à l'avenir

il vous parle en sous-entendus

qui bien en mal à parvenir

ont néanmoins tout défendu

Paname



L'amour ne naît pas du physique

il naît de l'idée qu'on s'en fait

de sa fraîche et jolie musique

et tout le reste est sans effet


Mon amoureuse est un naufrage

et mon naufrage une illusion

je n’ai pas trouvé les suffrages

à justifier cette intrusion


Cheminer à deux dans Paris

c'est valser sur le dos d'un ange

et puis rêver quoi qu’on parie

qu’on peut s’extirper de la fange


Un peu froid dans le fond du cœur

il est très tard il est trop tôt

du jeu l’on n’est jamais vainqueurs

et notre Seine est sur tréteaux


La Poésie n’est pas de nous

le vent vient nous souffler des choses

acteur on naît mais à genoux

voire ivre et sur le cul si j’ose


Un jour j'ai du quitter Paname

abandonner ma belle amante

écrite à ce mauvais calame

en vérité quoi que l'on mente

vendredi 13 décembre 2024

Papillon de lèvres



Le désir est l'espace où s'épanouit l'idée

que l'on est immortel en vain nous orfèvres

affublés de beaux mots on doit les taillader


J'irai cueillir en ta bouche un papillon de lèvres

au fil de ta respiration j’aimerais me vider

de mon air innocent qui me blesse la plèvre


Étant l'enfant d'une nébuleuse incroyable

amoureux d’un éclat pour une heure ou trois jours

il me sera donné ce juge impitoyable

en un jour un instant tout mourra pour toujours


Rien n'est jamais plus beau qu'un vrai premier baiser

c'est mon écriture illimitée tout en toi

la gouttière ai suivie puis je l’ai déposé

là juste sous ton nez ce creux marqué du doigt

jeudi 12 décembre 2024

Wilde



Peut-on être un poète en n'ayant pas tout lu

— sans considération c’est souvent mal au cœur —

on ne peut pas l'être en tout cas n'ayant rien lu


Tous les diminutifs sont toujours réducteurs

— à chaque orée du Rien réside un Absolu —

sous couvert de tendresse ils cachent la rancœur


Oscar Wilde un modèle et ça vous étonne

écrire est la façon la plus ankylosée

de verser des versets qu’en ce geste on bétonne

enterrant son passé sous la tonne imposée


La nuit tombe opportunément comme un rideau

sauvage — et sa paupière ayant fait des victimes —

en phare enfin braqué sur des yeux remplis d’eau

chaque amour est un leurre une attirance ultime

mercredi 11 décembre 2024

Séquelles



Nous bâtissons le Monde afin de l'habiter

mais nous coulons Rimmel assez mal appliqué

la beauté compte autant que compte la bonté


La larme à l’eau s’ajoute et s’y trouve embarquée

(nous ludions nous luttions contre la remontée

qu'Archimède en principe avait pronostiquée)


Chaque jour est la nuit quand la pluie l'asphyxie

tout ce froid qui nous reste à la séparation

quand le désir atteint par une anorexie

fredonne un petit chant cherchant réparation


Ce qu'il y a de brutal en fait dans la Manche

est ce fronton liquide à la porte duquel

on se trouve planté sans racine et sans branche

infiniment soumis aux marées en séquelles

mardi 10 décembre 2024

Le verbe ôté



Lorsque le pollen à foison

tisse un habit fait de printemps

je m'enrhume aux parfums poisons

m'enivrant des amours d'antan


La nuit s'étend sur nos pensées

comme un rideau cousu de peaux

tant arrachées et dépecées

qu'on en a fait des oripeaux


Mon écriture au cœur du vide

est comme une bouteille à la mer

et ton sourire un peu perfide

a tout fait pour qu’on la libère


Aucun amour en vérité

n'a le potentiel infini

de sa propre inventivité

d’un trait de Leonor Fini


J'aimerais t'enlacer de mots

qui tisseraient autour de toi

l'étreinte amortie de mes bras

par tes seins ces jolis jumeaux


S'il n'y avait pas l'écriture

on oublierait la vraie beauté

et puisque rien jamais ne dure

on garderait le verbe ôté

lundi 9 décembre 2024

Underground



Ce récit se compose hors sol

et se décompose en fadaises

en ces mélodies de sous-sol

où l’espoir est une foutaise


Underground est l’être inhumain

se cachant comme un rat vulgaire

au couteau tracées dans ma main

mes nuits portent conseil de guerre


« Attention : chut aux cœurs de pierre ! »

et dans ce silence absolu

j’ai déplacé ma serpillière 

à pomper des mots révolus


Mais que cherche à faire un poète ?

Un peu de vent né d'un tapis

d’idées que l'on secoue — bluette —

où l'amour est une utopie ?


De la vision de l'âme humaine

et de sa faiblesse éperdue

lui m'a donné des clés sereines

un bon-sens à jamais perdu


Notre avenir est incertain

Qui que nous soyons

Où que nous vivions

Profitons de ce jour qui vient

dimanche 8 décembre 2024

Il s'ombrera



Il n'est jamais l'heure à dormir

il est toujours temps de rêver

mais le souvenir à vomir

reste en notre écorce à graver


Tel un graffiti sur les murs

un mot doux dure et se maintient

la Poésie comme un murmure

échappe au lois du quotidien


Je suis un enfant du solstice

où l'hiver est sombre et solaire

où l’étrangère araignée tisse

une toile étoilée dans l’air


On meurt en manquant d'attention

de chaleur au ventre (on grossit)

de nourriture et de boisson

de désir et d'amour aussi


Nous parlons incorrectement

des jolies choses de la vie

de nos propres sentiments

changeant incessamment d'avis


Je resterai pendre à ton cou

tant que la corde de tes bras

ne m'aura pas donné le coup

de grâce où l’éclat s’ombrera

samedi 7 décembre 2024

Perdre et peur



La tempête est au cœur et puis le ciel est gris

la pluie tombe et violent le vent moins water-proof

éprouve en nous le sentiment d’un mal aigri


Le silence est l'expression d'un cri qu'on étouffe

et si j'étais Rimbaud j'arrêterais l’écrit

des cheveux qu’on s’arrache on fait vraiment des touffes


Aimer c'est périlleux mais le fuir est mortel

l'amour en vrai n'est qu'une question de non-choix

dans notre relation nos âmes s’écartèlent

et nous faisons semblant sans foi cent fois de joie


Mais tout à la la noirceur dont nous sommes empreints

mon seul désastre est d'aimer plus qu'il ne faudrait

je puise au cœur de notre solitude un grain

si j'ai peur de te perdre alors je te perdrai

vendredi 6 décembre 2024

Merveilleux Monde



Le Monde est beau partout quand on sait l'observer

quand les yeux dans les yeux tout est vu droit devant

quand l’idiot laisse ainsi tout ému l’énervé


Si nos récits d’amour aussi sont décevants

c’est parce qu’en n’ayant pas su nous préserver

nous sommes des fétus balayés par les vents


Je vous laisse un message à l'attention des rêves

en bouteille à la mer aux flots se refermant

comme un coquillage abandonné sur la grève

un petit bout de nacre en sera le ferment


L'antidote à l'horreur est la beauté du Monde

à la guerre est la paix que nous attendons tous

et ces dictateurs inhumains qui nous répondent

à coups de bombe en font l’humanité qui tousse

jeudi 5 décembre 2024

Le Pont Marie



La beauté se conjugue un beau jour au pluriel

elle aussi se découvre à chaque coin de rue

comme un chapeau salue sous sa lune de miel


Aimer c'est s'oublier dans le lit d'une crue

dans le flot dans le flux dans le flanc dans le fiel

et dans notre océan bien trop cuit qui l’eut cru


L'attirance est la partition fort illisible

on le sait dans la crise — en créant on survit —

mais le désir en lui porte un feu moins paisible

éclairant le chemin cahotant de nos vies


Je te veux tu me veux parfois on se marie

le bonheur est enfoui dans un tas de promesses

on s’en lasse on s’enlace à notre Pont Marie

quoi qu’il en soit Paris vaut bien plus qu’une messe

mercredi 4 décembre 2024

Dure Limite



Le crépuscule embrasant les flèches de

la cathédrale de Coutances — au loin —

c'est d'une beauté saisissante

autant que me sont revenantes

odeurs d'herbacées transpirantes

au fil laineux de ma mémoire adolescente.

On tire et les habits se défont

chacun se retrouve à poil

à rebrousse-poil aussi parfois

déshabillé du souvenir.

Au sujet du prétexte littéraire

— un « pré-texte » est l’ensemble des pensées

précédant l’Écriture —

une expérience affective

est effective

il faut bien l’admettre

une mamelle à traire

abondante en lait d’opium

en anecdotes

assez souvent traumatiques

enrichies

de gestes malheureux.

Ta nana comme une étoile filante

tu la regardes briller

dès qu'elle a filé

son bas

tu peux guetter la suivante

(un amour vrai

ça se gagne une fois

puis se perd le reste de la vie).

C'est aux antipodes des notions

de cotations

boursières

et de valeurs réelles.

C'est à l'infini des sensualités matérielles

un mélange de souffrances

et de jouissances.

C'est un absolu

l’instant fugace et pourtant pour l'éternité

c'est une ordalie

le jugement d’odieux

petits détails

une dure-mère

encéphalopathique

un coussin méningé tenu par des nerfs pas du tout sympathiques

une dure-mère entoilée par l’arachnoïde

actant sa Dure Limite

une allégorie de l’Amour et des séparations qui en découlent

un mur

qui n'a pas de faim.

La nuit s'est installée

comme un transat' au-dessus des pins parasols

enveloppés des reflets d’argent

dont la lune menteuse

amorçant son C

tandis qu'elle décroît

fait dessins d’ombres fantomatiques

en éteignant l'éclat des étoiles.

L’écriture laisse au passé ce qui revient à ses arts !

mardi 3 décembre 2024

Canopée



C'est quoi écrire ?

Une idée te traverse...

On te la souffle

on ne sait d'où

parfois c'est dur

et parfois doux

parfois ma foi perverse

il faut en rire

au point que l'on s'essouffle

et pourtant l'air épure.


On cherche alors à la convertir

avant la Saint-Barthélémy

d’émotions

(des mots scions!)

que déverse un sang d’encre

épais comme un boudin

comme un bout d’impro’

(d’improvisation)

comme un but d’un pro’

sur un terrain d’amateurs

— on s’attache où l’on meurt —

et sa tâche (au sang)

c’est d’être indécent

d’être anodin

tandis que cinq bars te l’aient mis

par intraveineuse (alcoolique !)

afin de te sauver pauvre cancre…


Il faut me raconter la suite de l’histoire

un mariage ?

Un divorce ?

Un cocufiage ?

Un tour de force ?

Un dépotoir…

Il en va de nos vies comme un jeu de poubelles

où tournent les camions-benne inlassablement

La Liberté ?

Cela s’achète à coups de poings dans l’estomac

des coups de trique aussi quoique on débande enfin

La Vérité ?

Je n’en sais rien…

Je ne suis qu’un adepte issu de Saint Thomas

qui doit toucher les plaies pour y croire ardemment

les feux de nos amours éclairent les plus belles.


Écrire ?

Est-ce un soin palliatif ?

On se soumet souvent à la plume à l’épée

(sans ce masque inutile)

afin de transformer le plomb en pesants d’or

et le désir est volatile

il se dépose en rosée sur les canopées

sur le plafond rêvé du mode indicatif

où la conjugaison permet de le décrire.

lundi 2 décembre 2024

Brest '91



J'aimerais vous parler de Brest

en décembre 1991

alors que venait de s'effondrer l'URSS

en étouffant le putsch de Moscou durant l'été

le mur effondré

je rejoignais un bateau de guerre

en déplorant ma mère

morte

un peu plus tôt

salée l'addition

déplorant mes errances

et mon grand amour sacrifié

ma Béatrice innocemment dantesque

et ma culpabilité

tandis qu'elle avait su me suivre au bout du quai de la gare

Austerlitz

un soleil obscur

à sa douceur intrinsèque

Hourtin

le froid de novembre agressant les semelles

et le plomb de l'absurdité

tout s'emmêle

Il y avait sous les doigts du givre

un espoir incertain mais fondateur

et l'embarquement vers ailleurs

au bout du monde 

on la dit "cité du Ponant"

C'est même un message SNCF en gare à l'arrivée

comme une guillotine

on s'aime à tout vent

J'étais marin de guerre

on partait pour l'Afrique

et rien ne rassurait

on n'avait pas de fric

et l'on se susurrait

qu'il fallait s'envoler

loin de la taille humaine

en gros tout ce que je racontais dans mes « Fuites »

(à part Brest en décembre 1991

et cette ambiance improbable insufflée par Kurt Cobain)

une Golf GTI noire aux vitres fumées

comme des lunettes

et des nuits blanches en quittant l’arsenal

échappant le temps d’un soir à la discipline armée

guidé par les marins de carrière au volant

dans la Cité du Ponant

vers un port de commerce à l’époque encore assez délabré

glauque

— ambiance un peu « Cargo de nuit » —

mais en boucle un nouveau titre

on y baigne

écourte

écoute

au César

en plein PO-GO

« Smells like teen spirit »

Head banging

autant les étudiants que les marins

les jeunes filles et les garçons

dans l’abandon

de leurs inhibitions

de ce qui les irrite

un jeudi soir en automne

(en sortant besoin d’un sonotone)

et quittant le dancing

allant du bar au parking

en rejoignant l’arsouille en croisant les flics-mar’

en se couchant dans sa banette

(à ras du sol en dessous du niveau de flottaison)

juste en dessous des deux autres où ça ronfle

— à voile un vent ça gonfle

à vapeur on est plus malhonnête —

est-ce un rêve en mémoire ou bien un cauchemar ?