samedi 31 mai 2025

Le sommeil du monstre



Dans le sommeil du monstre on trouve un bel abri

nous fabriquons des mots qui miment le réel

et les murs érigés ne sont que de débris


Dans leur écroulement tout ce que ça révèle

est un passé fugace et dont on s’est dépris

pourtant tout nous revient d’un coup de manivelle


À chaque passion s'offre un choix velléitaire

un début de désir est un trésor enfoui

quand on déterre un grand secret faut-il le taire

on ne sait pas ce qu’il faut faire alors on fuit


L'objet de notre instance est habillé de blanc

nous nous sommes aimés comme deux inconnus

mais le mariage est nul lorsque l’on fait semblant

dans son sommeil un monstre est bien à demi nu

vendredi 30 mai 2025

Plancher



Je n'ai pensé l'amour en fait que dans son rêve

oubliant le passé — ce n’est pas un exploit —

dans ma mémoire une passion jaune était brève


Avec un mot choisi j’écrivais comme on ploie

le roseau de la plume est bien né comme on crève

vivre est un art ultime et survivre un emploi


J'ai laissé mes papiers voler comme un oiseau

se trouver étudiés comme ce livre ouvert

où je puise incertain ce qu’on taille en biseau

les vers secrets que l’on n’a jamais découverts


Au couchant le soleil est un feu de plancher

tout s’enflamme et tout brûle y compris l’abat-jour

interrupteur enfin puisqu’il faut l’enclencher

je ne suis que la nuit dont tu serais le jour

Absence



Le bas-bruit de l'intimité s'écrit sans fards

on conjugue au passé le verbe existentiel

on n’est plus qu’un schéma dont le monde s’effare


Une promesse est née que ce mot porte en ciel

un pont de nos baisers s'effondre à chaque écart

et dans toute méprise on oublie l’essentiel


Aujourd'hui je sais bien t'adorer bohémienne

à la fois sauvageonne et bourgeoise assagie

je tenais ta main délicate entre les miennes

en lisant dans sa ligne et ce dont il s’agit


J'ai prié Saint Glin-glin dans l'ombre d'un Saint Gland

le temps s’est écoulé d’un étonnant laps sans

le fouet de ma pensée me cravache en cinglant

nous ne sommes le fruit que de parents absents

mercredi 28 mai 2025

Les fantasmes du jour



J'ai bien caché dans mon cerveau ta beauté pure

rien ne dira plus rien des passions oubliées

si ce n’est l’ombre emportée loin de cette épure


Il faut sans sourciller tourner le sablier

reprendre au vrai zéro le compteur en coupure

et remettre en riant le bon vieux tablier


Je fais d'une pauvre odyssée mon beau voyage

et ton fil a guidé tant de pas qui m'éreintent

où ta paupière eut l'apparence d'un rivage

un secret m'entourait comme un grand labyrinthe


Au-delà de cela quelque en soit l’opinion

j’ai capté ton regard à la fin pour toujours

en nous l'inspiration croit comme un champignon

la nuit ne répondra qu'aux fantasmes du jour

dimanche 25 mai 2025

Leurre



L'instant d'hésitation qui retient notre vie

d’un fil aura le temps de nous reprendre en soin

quand on paiera la facture après le devis


Le curieux sentiment qui se disperse en suint

n’est pas l’explication de ce que j’entrevis

l'amour est question d'envie non pas de besoin


Nous sommes les enfants brûlants de nos lectures

on prie le dieu Destin qui ne fait pas un pli

dans notre âme troublée tout n’est que conjectures

encens dont la brûlure est un fait accompli


Traduire en mots l'esprit c'est chercher une issue

dans le dédale inouï dont le temps n’a plus l’heure

une ligne est rompue d’un fil on fait tissu

le sentiment d'un amour unique est un leurre

vendredi 23 mai 2025

Impressionnisme



Chaque instant de l'amour est comme un grain de sable

et coulant tout son corps au creux d’un sablier

qui peut se contenter de lents moments passables


Un gros trou de mémoire où tout peut s’oublier

la tombe de l’envie qui semble indépassable

à chaque fois dans l’échec on rend son tablier


Je me sens souvent seul au bout de chaque nuit

le gros dé qui ricoche en mon crâne — impair du

manque et passe le temps d’une roulette inouïe —

plus nous sommes perdus plus on est éperdu


Reste au cordeau vocal l’archet d’un violoniste

au parapluie local la baleine essentielle

les gouttes de la pluie se font impressionnistes

et le jeu des couleurs écrit son arc-en-ciel

dimanche 18 mai 2025

De desseins animés



Nous sommes très souvent de desseins animés

comme en brisant les liens de mon âme asservie

je voulais démêler un acide aminé


Le jeu du nœud gordien cela m’a desservi

ma Roxanne Alexandre un moment m’a miné

j'ai pris notre illusion comme un lieu de survie


L’ADN arraché remis en bandoulière

il a fallu marcher sur des rythmes constants

sur des pieds disposés de façon régulière

écrire est un produit qui se cueille à l’instant


Le temps passant la main quand je m’y consacrais

je n’ai pas oublié d’avaler la pilule

en fin de compte on s’est compromis au secret

nous sommes enfermés dans nos propres cellules

vendredi 16 mai 2025

Pont sage



J’écrirai le récit d’un poème enjambeur

et dont la prosodie qu’il adopte s’en feint

des vraies réalités qui se tuent au labeur


On fabrique du verbe à conjuguer sans faim

la tartine éclairée par un argent du beurre

et sa pâte à pétrir où le vice est sans fin


L’identité ne vaut que quand on revendique

— ordonnant de mes mains l'architecture inouïe

qui mène au rêve étrange où se mêle un indic’

il aura bien fallu l’acuité de mon ouïe —


Respecter celui qui ne te respecte pas

c'est te faire écraser sans moyen de réponse

il faut bien veiller à ne pas céder le pas

c’est ainsi qu’on se fout des vernis que l’on ponce

mardi 13 mai 2025

Hyper du



Nous produisons des idées pour les échanger

mais pas les sentiments ni moins encor les gestes

en corps on voudrait bien pourtant ne pas changer


Vieillir est pour nous tous un supplice indigeste

et nos teints ont pâli de couleurs mélangées

d’un miroir abrasif à nos peaux palimpsestes


Hêtre aimé chêne au pied frêne et malgré son charme

une écorce est sur nous vérité dévêtue

face à Pouchkine un pistolet soudain que j’arme

un incident c’est l'amour qui se perpétue


Quand le duel est perdu les bons mots proférés

sont l’écho modéré d’un désir éperdu 

j'ai dissipé le goût des baisers préférés

dans le sirop sucré d’un fantasme hyper du

dimanche 11 mai 2025

L'idée de soi



De mon étrangeté garde un peu de lumière

un peu des feux de ce métro qui rentre en gare

underground à coup sûr enterré sous les pierres


En revanche en amour en comblant des retards

il m'a fallu grimper au creux de tes paupières

en plongeant dans le ciel ouvert à ton regard


Alors en dam de nage (et quoique l’on sombrât)

l'obscurité nous parle en nos clignements d'yeux

j'ai déserté ta vie mes envies sous le bras

je n'étais plus un homme et moins encore un dieu


Dans l'interrogation se trouve une réponse

un parachute était tissé de fils de soie

mais quand l’atterrissage est une chute absconse

on n'est que par l'idée que l'on se fait de soi

vendredi 9 mai 2025

Insaisissable



J'ai pensé le désir à la façon d'un sort

et me suis fait piéger par l’EGO par le JE

(quoi qu’il en soit on est heureux quand on s’en sort)


En pensant le désir à la façon d'un jeu

j’ai confondu l’attirance avec un ressort

un matelas s’avère assez avantageux


J'ai compté sur tes doigts nos parfaits décalages

en tout tout en entier me faisant le livide

une différence en fait c’est dans le cas de l’âge

un jeu dangereux c’est la stratégie du vide


Incalculable est la raison de ce secret

dont la formule était simple comme un bonjour

et pourtant cela s’avère assez bien concret

l'amour est insaisissable on le cherche toujours

mardi 6 mai 2025

Exorcisme



À la mémoire d’Émilie Dequenne


La nuit distille un jus que je déguste enfin

la fabrique du rêve est un projet magique

et son long corollaire est un récit sans fin


Mon sourire accentué se fait hémiplégique

un accent circonflexe à remettre au parfum

que l’on disperse au vent d’un simple analgésique


En aimant simplement de façon compliquée

je t'aime insensément pour me faire oublier

je veux te fuir aussi mais je suis impliqué

message en pointillés sur la pointe des pieds


Cette histoire est inscrite « if I was born to loose »

au recto de la feuille illustrant mon laxisme

en fabriquant du verbe et des tons de pelouse

écrire est la meilleure idée d'un exorcisme

dimanche 4 mai 2025

Les corbeaux



L'obscurité s'étend sur l'idée des Lumières

et sur le cœur au sacré sang des sacrifiés

dépendant tout d’un coup d’une rime infirmière


On se cache on panique on attend pétrifié

la terreur est l’idée qui n’est pas la première

aujourd'hui l'indulgence est un membre atrophié


Le combat son cancer est le fruit de la guerre

horrible initiation massacrant nos enfants

comme on dit si souvent dans la langue vulgaire

on est victime aussi d’un fantasme éléphant


Les corbeaux baptisaient des païens désœuvrés

couleuvrant sans indice au sein d’un vivarium

décrivant leur hospice en ayant manœuvré

je ne suis qu'un oursin dans un chausson d'opium

vendredi 2 mai 2025

Contournements



J'ai pensé ta beauté comme on visionne un rêve

où dans le cœur une braise est feu rouge ou vert

ou coquille oubliée tout au bout de la grève


On la trouve en traînant sur l’estran découvert

on l’écarte on la gobe et parfois l’on en crève

une envie que l'on pense est un vestige ouvert


Et la nuit que l'on passe à guetter l'insomnie

fonde un autre univers où nous nageons sans pied

des impressions d'idées des mots qu'un pensum nie

tout ce qu'on peut écrire en ayant du papier


Chaque nuit que l'on passe est un objet d'oubli

seul ou lové dans l'autre accouplés culs tournés

la solitude à deux ne fera pas un pli

le chemin de notre âme est par là contourné