samedi 31 août 2024

La terre



Quand le bout du monde est au bout de mes doigts

que l’écriture en coule à la façon d’une encre

attachant le papier dans de l’eau de Badoit


Ma vigie qui s’accroche à la façon d’un chancre

hurle en vue de la terre en tendant le bras droit

cette étendue rugueuse où l’esprit devient cancre


Et je me suis purgé comme un nuage occis

des forêts de boulots à l'écorce épelée

se vidaient de leur sens ce n’est pas très sexy

les vendanges du cœur extraient du sang mêlé


Parfois je redeviens le poète amoureux

parce que je n'ai pas vraiment connu l'amour

ou cru le connaître en écrivant malheureux

sa perte à jamais dans la terre et ses labours

vendredi 30 août 2024

Transport



Ta bouche en cœur est un repère où je m'égare

un fruit né d’une fleur au délicieux parfum

remplissant ton wagon j’ai fini dans des gares


En Cybérie mes mots te ciselaient d’or fin

palette à mes vers est la beauté d'un regard

où caresses sans fin m'ont laissé sur ma faim


Chaque goutte de pluie j'irai m'en abreuver

j'irai les recueillir au plus creux de tes mains

comme un savant fou de toi dépose un brevet

j'inventerai la voie d'un transport inhumain


Tous les matins je rêve au moment du réveil

et mon passé reflue dans sa vague charnelle

un joli sein galbé qui soudain m'émerveille 

un amour accompli de façon maternelle

mercredi 28 août 2024

Dague haubert



Je ne suis pas l’esprit mais la main que l’on serre

aux Jeux mous mes amis m’étant mis hors-la-loi

j’ai mis le slip au feu la culotte à l’insert


On dit dans des lieux sûrs — et dits de bon aloi —

que la vérole est mûre et le mur émissaire

on en dirait autant que le bon Saint Éloi


Chevaleresque est l’Art et la manière alors

haubert en lisse en lys à la fleur abaissé

d’arçon la lance est un fléau qui vaut de l’or

et la joute inégale ailleurs a commencé


Donne à mes bras la force indispensable à Toi

la résistance et l'axe où mieux te soutenir

en vérité je suis ton mur et toi mon toit

ma dague à ton service et moi ton souvenir

lundi 26 août 2024

De l'âtre à l'être



Le désir est un instrument désaccordé

sur lequel on répète en vain quelques gamètes

à défaut d’autorisations mal accordées


Pourtant l’écrivain vain pondant quelques ramettes

essaie d’enfouir en lui sa ligne et ses cordées

ses sensations « pouss’toi de là que je m’y mette »


Un vent fou nous conduit souvent de l’un à l’autre

indépendamment tu le sais des sentiments

ce feu qui va souvent brûlant de l’âtre à l’être

et s’éternise un temps volage et qui nous ment


Nous sommes composés des endroits qui nous font

du kaléidoscope infini des lumières

et de ces trous marins qui nous semblent sans fond

de la tristesse issue de cette joie première

vendredi 23 août 2024

Coquelicot



Il pleut dans mon sommeil où la Poésie pleure

ô nuit tombe en guillotinant le soleil

le coquelicot sanguinolent c’est ma fleur


Emprisonné dans la cellule où je balaye

hors d’un neurone un peu du sable qui m’effleure

il faut dans ces grumeaux souvent que je délaye


Un peu de léthargie tétée dans des seins qui s’en font

j'ai vu des pluies d'aurore arrosant d'aussi près

qu’on le puisse et puisé dans ce puits sans fond

des libertés perdues pendues sur des cyprès


Les bruines sur le lac ont regonflé son ventre

en mourant je serai l'époux d'une veuve ivre

enfin rien ne saurait décider de son centre

rien ne peut décéder lorsque l'âme veut vivre

samedi 17 août 2024

L'espoir obscur



Il faut compter sur la Nature et la chérir

et la tienne est splendide et luxuriante en fait

ma vraie signature est ton merveilleux sourire


Il se conjugue au mien dans son plus-que-parfait

dans ce passé perdu cessant de dépérir

(oripeaux écorchés mais du plus bel effet)


Pourtant c’est illusoire — un mirage ambitieux —

ton image en fumée s’évapore et c’est lent

tes jolis seins ton joli corps et jolis yeux

tout disparaît tu n'es qu'un fantôme excellent


L’approche est néanmoins facile et semble innée

j’esquive en crochetant le geste un brin ringard

épousant de mon doigt la courbe de ton nez

trouvant l'espoir obscur au fond de ton regard

jeudi 15 août 2024

Le victimaire



Je suis le victimaire usant des circonstances

afin de frapper mort-né ton profil en moi

parasitant ton rêve en puisant sa substance


À mes cérémonies je suscite l’émoi

c’est dans les homélies que j’organise en stances

où l’on trouve un alien et pourtant c’est bien moi


Ma solitude est ma dernière intimité

l’expression d’aliéné dont l’existence est mue

par le Verbe écrit jusqu’à ses extrémités

par un besoin de métamorphose et de mue


Je tiens dans mon sourire absent bien des sentiments

de chaos granitique et qu’un jour ils rangèrent

il faut bien que tout passe et quand bien même on ment

les caresses des mots sont ma langue étrangère

dimanche 11 août 2024

Échiquier



Parfois la nuit s'amène et nous la rejetons

nous avançons la pièce indiquée sur la case

et nous perdons le Nord et tous ses rejetons


L’hiver est l’échiquier dont on saisit l’occase

afin d’être à l’endroit d’où nous nous rachetons

le damier noir et blanc fait d’envers et d’oukazes


En pauvreté perclus infiniment nous sommes

enneigés dans la boule où nous nous agitons

j'ai compté sur mes doigts tant de bêtes de somme

au moins autant que de beautés ou de gitons


Les règles du jeu sont loin de ce qu’on loua

la Poésie s'étripe en posant ses viscères

au grand jour aux regards aux tables de la Loi

ne sachant plus à quoi tout d'un coup la vie sert

dimanche 4 août 2024

Raccommodages



Je cherche incidemment le vrai du faux chez nous

sans négliger le fait que nous nous amusions

de ce jeu de dupe et de ce jeu de genoux


Pliez boutique au vent que nous en abusions

mais toi rend toi bien compte en ces nœuds qu’on dénoue

la liberté de vivre est la pire illusion


Dis-moi que je suis nul insulte aussi mes mains

mes yeux taris de l'arme ont cédé sous les tiens

d’un mot tranche à l’épée le fil de vie d’humain

qui me retient par cœur ouvert en vrai soutient


T’écrivant ce poème — un dont j’émis le vœu —

j'ai glissé dans ta poche oh poupée démodée

des billets amoureux brillant de mille feux

de l'ordinaire en pièces à raccommoder