Oui !
J’ai vos dents,
Comme
un trophée,
Autour
du cou,
De
ces crocs blancs,
Prêts
à serrer,
Ce
monde fou,
Dans
un carcan,
Très
acéré,
Un
piège à loup,
Oui !
Gévaudan,
Comme
un collier,
Est
comme un joug…
De
Margeride,
Jusqu’en
Aubrac,
En
Marvejols,
Quelques
séides,
Traquaient
la traque,
En
marche folle,
Crimes
sordides,
La
bête attaque,
Comme
l’alcool,
Cent
homicides,
Sang
dans la flaque,
Et
trente viols…
On
ne peut pas s’imaginer le Gévaudan,
Il faut le voir, le respirer de l’en-dedans,
C’est un lieu flou où le hasard est imprudent,
J’y suis allé à cinq et six et puis sept ans…
Il faut le voir, le respirer de l’en-dedans,
C’est un lieu flou où le hasard est imprudent,
J’y suis allé à cinq et six et puis sept ans…
Dans
ses sous-bois, j’allais cueillir les champignons,
Et dans ses prés, les frais rosés, les mousserons,
Près des genêts, les chevaliers bagués si bons,
L’ombre de la bête planait aux environs…
Et dans ses prés, les frais rosés, les mousserons,
Près des genêts, les chevaliers bagués si bons,
L’ombre de la bête planait aux environs…
C’est
entre le Malzieu et Saint Chely d’Apcher,
Que de la bête, l’histoire me fut contée,
Et de ses trois ans d’itinéraire meurtrier,
De femmes et d’enfants à ses dents sacrifiés…
Que de la bête, l’histoire me fut contée,
Et de ses trois ans d’itinéraire meurtrier,
De femmes et d’enfants à ses dents sacrifiés…
Décapitations,
éventrations, écorchages,
Nul autre animal ne commit pareils carnages,
Ce n’était pas un loup pas plus qu’un chien de rage,
On eût dit la bête échappée de quelque autre âge…
Nul autre animal ne commit pareils carnages,
Ce n’était pas un loup pas plus qu’un chien de rage,
On eût dit la bête échappée de quelque autre âge…
Fi
du capitaine Duhamel, en cavale,
Se riant des battues, si perfide animal,
Il se riait aussi des plus habiles balles,
Charles-Marc-Antoine Vaumesle d’Enneval…
Se riant des battues, si perfide animal,
Il se riait aussi des plus habiles balles,
Charles-Marc-Antoine Vaumesle d’Enneval…
François
Antoine,
Sieur
de Beauterne,
Le
louvetier
D’un
roi idoine,
Sieur
beau mais terne,
En
fit les frais,
Et
des arcanes,
Et
des cavernes,
Où
se terrait
La
bête infâme,
Quoique elle
hiberne,
N’était
pas tuée…
On
fit mensonge
De
quelques loups
Assassinés,
Et
de pieux songes
Pour
quelques sous
Presque
volés,
Mais
à rallonge,
La
liste en nous,
Venait
graver
Ce
qui nous ronge,
Dans
nos remous,
Nos
peurs ancrées…
C’est
un soir de Juin dix-sept cent soixante sept,
Que de couler, l’histoire, comme sang, s’arrête,
Du bon marquis d’Apcher, allant chasser la bête,
Avec ses gens et famille Chastel en tête…
Que de couler, l’histoire, comme sang, s’arrête,
Du bon marquis d’Apcher, allant chasser la bête,
Avec ses gens et famille Chastel en tête…
Jean
de Chastel, étrange père, et ses deux fils,
Gens cultivés, un peu sorciers, sans artifices,
Près de Langogne, il s’asseyait, comme à l’office,
Puisque miracle, il le fallait qu’il accomplisse…
Gens cultivés, un peu sorciers, sans artifices,
Près de Langogne, il s’asseyait, comme à l’office,
Puisque miracle, il le fallait qu’il accomplisse…
Elle
était devant lui, assise sagement,
Comme devant son maître, en monstre pénitent,
Chastel arma son arquebuse calmement,
Fit feu, le monstre retomba en titubant…
Comme devant son maître, en monstre pénitent,
Chastel arma son arquebuse calmement,
Fit feu, le monstre retomba en titubant…
Naturalisé,
le cadavre, à malfaçon,
Fit le voyage de Paris jusqu’à Buffon,
Parvenant en état de décomposition,
Nul ne put dire s’il s’agît d’un loup ou d’un lion…
Fit le voyage de Paris jusqu’à Buffon,
Parvenant en état de décomposition,
Nul ne put dire s’il s’agît d’un loup ou d’un lion…
Or,
d’un roi déçu, sous de faux airs impavides,
Ordre fut donné d’enterrer l’être putride,
Quelque part, sous Versailles, légende réside
Que d’aucuns piétinent encore d’un pas vide…
Ordre fut donné d’enterrer l’être putride,
Quelque part, sous Versailles, légende réside
Que d’aucuns piétinent encore d’un pas vide…
Mais
la bête
N’est
pas morte,
Elle
vit,
Autre
part,
Dans
nos têtes,
Qu’elle
en sorte !
C’est
folie !
C’est
trop tard…
J’ai
vos dents
Sur
mon cou,
C’est
à mordre,
A
laisser…
Gévaudan,
C’est
le trou,
Le
désordre,
Bas
blessé…
Bas
bât, bah...
Blablabla...
La
bête est en nous, partout, sans emphase,
Elle
est dans l’urne du dernier votant,
Des
dictatures dont elle est la base,
De
leurs tortures et de leurs néants.
On
peut se questionner, chercher les cases,
Se
demander ce qu’elle était vraiment,
Mais
le « pourquoi », loin de faire l’extase,
N’a
pas vaincu le « qui » ni le « comment ».
Ces
enfants de naufrages, de nos phrases,
Feu,
détresse, périt phrase aux couchants,
Quand
de ces lames qui parfois nous rasent,
Restent
aux doigts quelques gouttes de sang.
Alors
les pluies se remettent en phase,
A
Mende aussi, puisque tout est payant,
Et
qu’en Lozère, les airs sont des gaz,
Et
que nos guerres sont en GEVAUDAN.
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