mardi 12 novembre 2024

À corps et âme



J'ai dépêché dans le bassin de ton regard

un poison merveilleux dont l'encre est de ce bleu

qui fait l’âme amoureuse et le clin d’œil hagard


Un cyanure emprunté sur des bas-fonds sableux

peut-être aussi volé sur le quai d’une gare

on ne sait jamais ce qui déteint quand il pleut


La nuit fournit au lâche un pauvre abri précaire

autour étrangement de nos littératures

et de tous les tracés d’un compas d’une équerre

et d’un itinéraire en sa température


Enfiévré je t’écris sur cette mélodie

la parole est donnée si l’on s’en donne accord

respirer l’air ambiant puis tout ce que l’eau dit

tous deux sont imprégnés du parfum de ton corps

dimanche 10 novembre 2024

Guéridons



J'ai péché sur ta lèvre un oiseau de plaisir

envolé si soudain que ton sourire éteint

n'a gardé que sa flamme allumant mon désir


Et parfumée d’encens ta peau douce en est un

l’attraction d’un corps est née du verbe gésir

où ma vision de nous d’un miroir en est tain


J'avance à coups d'épaule à coups de cœur innés

quand je démets des mots les uns devant les deux

— désarticulant mon pantin mou suriné —

je me ressens parfois très beau (naguère hideux)


Pour nous ensorceler je fais tourner des guéridons

dans des oscillations contre toi démarrées

des vibrations disant ce que la guerre est donc

tandis qu’on se balance au rythme des marrées

samedi 9 novembre 2024

Mercosur



La frontière établie j’ai mis mon tablier

j’étais amoureux d’une amazone à jamais

pendant tout ce temps-là gémit mon sablier


Puis j'ai creusé ma tombe en pensant à l'Art mais

c'est justement pour elle en voulant m'oublier

que perdu dans mon trou je m’étais mal armé


Je chasse en pleine nuit comme un oiseau de proie

le mot qui cherche à m'échapper dans un talus

le vers ayant les dents aiguës d'une lamproie

le verre et l'eau qui coule et tout ce que t'as lu


Liquide argent vif et corrompu parrain

le Mercosur est loin d’être un Eldorado

mexicanisation des désirs un par un

tu deviens déjà ma Méduse et mon radeau

vendredi 8 novembre 2024

Tricotage



La pelote emmêlée j’en défaisais des nœuds

le fil d’Ariane était fragile était en prise

et l'amour un espace infime entre nous deux


Le fils au saint esprit la fille enceinte éprise

en tricotant du verbe on devenait laineux

ces tondus sur le dos cédant à cette emprise


On conçoit l'attirance en n'ayant qu'impression

de beauté déjà vue comme un sexe apposé

des vers que je finis d’un point de compression

pour éviter à l’encre un champ décomposé


L’aiguille à tricoter dans sa veine enfoncée

j’étais bien son poète et je maudis ces maux

que je pense et j’écris qui font sens et font ses

tressaillements divins de nous deux des jumeaux

mercredi 6 novembre 2024

Nova



Je veux boire à nouveau dans le creux de tes mains

l'eau qui me régénère et m'offre les ressources

inouïes de l’énergie que je puise en ton sein


Je veux remonter à toi comme on remonte à sa source

et dis de mes dix doigts tracer dans ton dessein

le parcours étonnant vers toi de ce gros ours


Sur ta lèvre inférieure un baiser survolé

a le goût de celui que l’on fait au miroir

il est l’éclat du but fermé sous ses volets

nos amours ont l’aspect d'oublis dans un tiroir


Et ton sourire unique est mon soleil immense

il brille intensément ma petite Nova

par toi l’écriture est la place où tout commence

aimer c'est s'inventer sans savoir où l’on va

dimanche 3 novembre 2024

Rivage



Dans mon cerveau soudain les trains de mots s'alignent

autant de wagons nus déportés par les nues

victimes d'un passage à la passion maligne


Être un ver à l'envers que le présent dénue

se métamorphoser comme un contact en ligne

est-ce apparaître au bout d'un oppressant début


Je ne suis pas si droit je suis un peu bancal

et j’irais bien pourtant en écrivant ces mots

gratter les sentiments sur tes cordes vocales

aider ta corde sensible aux sens animaux


Trop belle es-tu c’est vrai mais j’aime la bagarre

écrire est ce combat parce que tu m’as plu

mon naufrage abandonne aux feux de ton regard

un rivage absolu que je n'atteindrai plus

vendredi 1 novembre 2024

Samaïn



J'ai rêvé d'horizons de grands feux indécents

de ta peau tiède aimée de mes doigts ambitieux

ma sorcière est bûcher son corps incandescent


J’ai cueilli ce brasier qui me tombait des cieux

météore enflammé vêtu de l’un des sangs

dont j’hérite usurpant cette essence en tes yeux


Notre attrait se décide à coups de foudre et d'eau

d’éléments substantiels en mélange à leur nombre

attisé par la peur et tirant le rideau

la nuit nous ouvre à tous un vrai théâtre d'ombres


Appauvris tous les deux de nos impairs hâtifs

ennuis de Samaïn on parle à nos défunts

l'amour en vrai se conjugue à l'impératif

aimer c'est se donner à la mort à la fin