lundi 28 octobre 2024

Les autres



Souvent la vie commence en pensant à la mort

rêver plus loin c'est vivre en allant de l'avant

mais c’est se réveillant qu’on s’en rend compte alors


Un calendrier né de celui de l’avent

nous rappelle à ces mots qui font du plomb de l’or

en effet que notre réponse est dans le vent


Le puits de l'encre est un récipient de rancœurs

où l'on trempe sa plume en tremblant de la main

qui la guide pourtant dans les sursauts du cœur

et dans la plaine allant de l'hier au demain


L'enfer est un trou noir un puits de gravités

qui nous entraîne au fond quand nous sommes des vôtres

en parlant des sujets qu’on ne peut éviter

nous sommes les fantômes du présent des autres


samedi 26 octobre 2024

Ballade au bout du Monde



Nous passons dans la vie comme passe la pluie

(le souvenir est la charogne du présent)

pourtant je ne l’avais connue que par appui


Juste avant d’arrêter mes mots pendant douze ans

douze écrits fur’nt offerts (ils ont brûlé depuis)

j’allais de ligne en liane un peu comme un Tarzan


J'ai laissé dans un Brest occupé par amour

un body magnifique aux manches en dentelles

une ombre obscure éclairée par des yeux de jour

à l'azur assourdi maintenant m’entend-elle


En gros j’étais dans les bras d’une ex-amatrice

en attendant que le réveil et l’alarme sonnent

écrire est mettre un doigt dans l'encre et sa matrice

au son de la ballade à Melody Nelson

vendredi 25 octobre 2024

L'achèvement



Nous sommes dans la tentative inespérée

de fabriquer l'humain sans son humanité

sans plus de sentiments — cancer inopéré


De l’âme inopérante et sans d’identité —

l’intelligence artificielle est repérée

la chair est faible et nous restons son entité


L'attirance érotique est une hésitation

va devant-derrière et promet son logiciel

on pourrait bien rester tout en lévitation

sans jamais s'efforcer d'oublier l'essentiel


On pourrait être un moteur en cherchant ses chevaux

la mécanique enfin que l’on poursuit sans trêve

un sac inouï dont on emmêle l’écheveau

chaque amour est une ambition que l'on achève

mardi 22 octobre 2024

Alentours



Quoique je sois surdoué pour quelques boniments

je m’attache aux sujets dont je fus scrupuleux

je me suis donc nourri de notre dénuement


Sous tes reins j'ai vécu des instants fabuleux

souterrains des moments dans de beaux monuments

dans notre galaxie des endroits nébuleux


Procréant des enfers au lieu de paradis

je ne savais qu'en faire en apprenti sourcier

je marche à la baguette et tu me l'as bien dit

"tu finiras ta quête au fond d'un souricier"


J'ai posé sur ta bouche un ferment du futur

un serment d'amitié comme un lien sans retour

et dans ma tentative et puisque rien ne dure

un baiser sans pitié qui perdure alentours

dimanche 20 octobre 2024

Les amours alarmées



J’ai compté dans ta main m’accordant mon monôme

épelé tous les mots que j’écrivais pour toi

j'ai mangé sur le bout de tes doigts mon aumône


Énumérant nos vœux (tandis qu’on s’apitoie)

j’ai pondu des versets parlant des jolies mômes

et déversé des maux qui m’ont laissé pantois


Ma tristesse éblouie mieux te regarde en face

es-tu mon beau bourreau dans un écrin de sang

ma détresse accomplie que le destin préface

ou ma chaire amoureuse à manger indécent


La nuit ne débutera qu'à la fin du jour

où des roses lancées se seront refermées

je sais bien que si "jamais" rime avec "toujours"

un beau verbe s’impose aux amours alarmées

vendredi 18 octobre 2024

Dévoration



L'amour que l'on conçoit n'est qu'un enfant sans père

et son souvenir est tenace amer aux goûts

quinze ans qu’alimente un courant de quinze Ampères


Un regard émeraude éclairci par à-coups

ton visage de Vierge en priant « Notre Père »

et dans les yeux de jade un reflet pour beaucoup


Tous les mots qu'on oublie n'étaient pas à poser

mais la beauté c'est ton visage et ton sourire

un sentiment subtil à ta bouche apposé

ton silence emprunté ta larme et tes fous-rires


On conçoit cet amour en enfant qu’on nettoie

qu’on lange et qu’on retourne et parfois c’est malsain

l'ombre de mon naufrage est le portrait de toi

ma passion dévorante est inscrite en ton sein

mardi 15 octobre 2024

Ce que le cœur entend



J'ai raconté des linéaments de nos âmes

en serpentant tantôt de ci tantôt de là

chaque mot que je trouvais m’était un sésame


Endormi dans des rondins de bois coupés ras

le crâne emmitouflé j’écrivais à la rame

un paquet de pas-pied dans l’eau de l’au-delà


T'étais belle à la façon d'un saule éploré

je t’avais prise au mot comme une main posée

mais ça nous pique aux yeux — la piscine est chlorée —

l'amour est un récit de confiance imposée


Je rêve un univers improbable et somptueux

qu’on pense encore un peu quand on a quarante ans

la fée verte au jeu spirituel en spiritueux

nous faisons par passion ce que le cœur entend

vendredi 11 octobre 2024

Nuits brestoises



Je me souviens des nuits sans fin du bout du Monde

et d'épouser son corps en écoutant la pluie

sous la musique aussi les souvenirs abondent


En dégouttant la note est sur un parapluie

de partition perdue que la mémoire inonde

avec un vrai talent d’Achille et par appuis


Je n'étais qu'un fantôme et sa chair était vive

en étant au chaud quand la lampe était éteinte

on sentait palpiter son cœur et tout arrive

un impression d’eau-forte à nos passions déteintes


À Brest enfin le jour où tout a basculé

tout fut fini pourtant c’était ma sinécure

et maintenant lointain futur émasculé

ma nuit se pose à la façon d'un voile obscur

mercredi 9 octobre 2024

Immunité



Je me suis endormi sur un tranchant de l'âme

il a rasé ma peau puis arasé ma foi

j’écris pour me soigner ma plume est un calame


Il ne faudra pas me le répéter deux fois

ce mollusque encorné par un tort au « salam »

allait comme un serment venimeux dans le foie


Tout en créant sa douve — un château dans l’absence —

on était ses enfants pataugeant dans la boue

d'un temps perdu d'avance en notre adolescence

on luttait en cadence et nous restions debout


J'étais aveugle à la vision qui me le dit

mais survivant dans un pays totalitaire

où tous les droits bafoués sont notre maladie

la Poésie c'est un système immunitaire

samedi 5 octobre 2024

L'attirance



J’ai bâti des châteaux j’ai débattu des cartes

en Espagne ou d’ailleurs on rêvait d’arriver

c’est bien le bout du Monde en critiquant Descartes


Ou Rousseau/Voltaire (un don qui shoote à virer)

je ne pensais qu’à toi juste avant qu’on m’écarte

inaccessible étoile au pouvoir avéré


J’en ai connu bien des savants nous servant thèses

à foison concernant leur interprétation

de Rossinante ou Dulcinée de Cervantès

alors que c’est le feu de cette incantation


Ce qui de temps en temps donne un sens insensé

— qui véhicule en bref un instinct de survie

brutal — au désir éprouvé comme impensé

l'attirance est une impatience inassouvie

mercredi 2 octobre 2024

L'autre rive



Si je fais le bilan soucieux d’un terne été

je ne vois que du vide et tant de temps perdu

je suis à la poursuite idiote en vanité


De ce que je croyais qui nous était indu

quand nous faisons l'amour on rêve éternité

quand nous pensons la mort un songe est éperdu


Le sommeil est le bout d'un parcours inventé

les tout petits moutons sous les lits s'accumulent

et les mots du Poème aussi sont éventés

l’écho de ce passé que le présent simule


Écrire est la façon de mener un combat

contre le temps qui passe il nous reste l’envie

le murmure absolu quand je dis ton nom bas

la bonne nuit c'est l'autre rive où l'on survit