dimanche 26 mai 2024

Otage



J'avais quinze ans quand sa bouche de jeune fille

est doucement venue se poser sur la mienne

un souvenir est au sein de nos vies qui défilent


Elle était brune et nue comme on est bohémienne

et moi j’étais puceau tout mince et comme un fil

au versant féminin sans fantaisie lesbienne


On se rêve soi-même en feignant d’écouter

comme un vilain poisson j’étais pris par une ouïe

(sorti de l’eau fermée j’essayais d’écourter)

la beauté féminine est un soleil inouï


Souvent nous recevons des coups de pieds occultes

à chaque échec en plus je saute d'un étage

à chaque inspiration je me sens plus inculte

à chaque hésitation mon cœur est en otage

vendredi 24 mai 2024

Rouge éclatant



La douceur de ta peau (souvenir éternel)
est le fruit des passions qui s’envolent au vent
la voie lactée future à ton sein maternel

On est bien loin du sexe et des aveux décevants
du mercantilisme et loin du désir charnel
l'amour est un baiser qui se vole en rêvant

Ton ventre rebondi c'est ma Terre promise
un peu de chair humaine et de fertilité
sur quoi tisser enfin ta robe et ma chemise
— un peu de lin de chanvre et plein d’habiletés —

Rien n'est vraiment plus beau qu'un féminin sourire
un vrai soleil levant nourrissant le regard
abreuvant notre espoir oubliant de mourir
et le tien dans son grand rouge éclatant s’égare

mardi 21 mai 2024

Les jeux à somm’ non nulle

 


J'ai des étrangetés lancées au pied du mur

et poussant champignons tout au long des pensées

dans chaque relation l’affect est une armure


Il est un fantôme en matériaux compensés

comme un bateau saoulé voguant bâbord amure

évitant de compter l’énergie dépensée


Dans chaque événement la source est intangible

elle amène à ce fruit dont nous crevons d'emblée

mais tout en jaillissant elle est incorrigible

elle est ce don nous dont nous récoltons le blé


J'ai l'image à l'esprit que je transforme en mots

définie dans mes doigts de l’ongle à la lunule

afin de te convaincre (on est des animaux)

qu’on n’est rien que des pions de jeux à somm’ non nulle

vendredi 17 mai 2024

La couleur des mots

 


Je n'écrirai jamais sans suivre ton pinceau

sans ressentir enfin ta caresse artistique

et me sentir au moins un petit peu moins sot


L'apparence est toujours une illusion d'optique

et je garde à mon doigt soigneusement le sceau

qui vient sceller de sang notre union cathartique


Écrire en Poésie c'est créer de l'ambiance

un jazz au nœud gordien dont les fils se dénouent

la femme en sait l’effet l’homme en fait la sapience

un temps qui passe est juste un espace entre nous


Quelques idées du Monde ont changé ma vision

le contraste est puissant — « Capitaine » est « Némo » —

comme un adage ancien qu’on tourne en dérision

ma plume est ce pinceau dans la couleur des mots

mercredi 15 mai 2024

Survivre

 


Chaque nuit m'accompagne en serrant mon squelette

et le matin survient ramassant tous les os

les broyant en la poudre essaimant ma palette


Et ce petit infect et son dégât des eaux

tout inondé de l’arme en forme d’arbalète

équipe de carreaux le renégat des mots


L'attirance poreuse est une incertitude

elle est une illusion qui nous berce d'espoirs

alors qu’en l’hémisphère où change l’attitude

un cerveau ne voit plus le fromage et la poire


Un désir attirant n'est jamais deviné

ce n’est qu’à la limite une autre suggestion

quoi qu’il en soit de nous lorsque l’on a du nez

survivre est un effort et vivre une question

dimanche 12 mai 2024

Plier le poème

 


Dans un essor abstrus ta flamme immense m’ardre*

et comment saurais-tu de quel bois je me chauffe

(un fruit de nos désirs est pendu sous son arbre)


Il y a du bien-être où ta peau me réchauffe

— en dépit des beautés je suis resté de marbre —

on est récompensé comme on est sain et sauf


Aimer céder au mâle et ce peu de terrain

mais tu le peux vraiment tant je me montre altruiste

et d’imagination le creuset de tes reins

d'amour imaginé n'est qu'une passion triste


Aimer la liberté c'est aimer la contrainte

un paradoxe extra’ (le reste est à vomir)

on peut se montrer chaste en rêvant d’une étreinte

il est temps de plier le poème et dormir


* "La Terre sent la flamme immense ardre ses flancs." — (José-Maria de Heredia, La Chasse, in Les Trophées)

vendredi 10 mai 2024

Dépensé

 


L'espoir est un navire errant au vague-à-l'âme

au creux de ton épaule il y a la beauté

la calligraphie sacrée qu’y trace mon calame


est l’ultime expression de cette robe ôtée

l’ultime achèvement de la tempête au calme

un orgasme enrichi d’un port escamoté


Tu dis "une aventure" en parlant de l'amour

et quelle exploration revêtirait donc elle

on sait bien mieux parler de propos que d'humour

à moins que l'on s'oublie dans tes bas de dentelles


À moins que l’on oublie les ébats de demain

les doigts tâchés de l’encre à l’argent dépensé

d’un tel aquamanile on se lave les mains

je n'écrirai plus rien qui ne soit tes pensées

mardi 7 mai 2024

Le destin

 


Le destin comme un fil est l’image qu’on tisse

il déteste l'amour et j'abhorre adorer

le désir est le fruit d'identités factices


on lui trouve un peu trop d’importance arriérée

quoi qu’il pousse un peu comme une plante adventice

on lui trouve un prétexte une excuse avariée


Le destin ce cocon que l’on défile en soie

que l’on défie parfois le coupant dans sa main

« Mektoub » on l’appelle et pourtant quoi qu’il en soit

mon idéal éphémère est un brin féminin


Je ne connais pas la fille qui m'aimerait

ni dans l'ombre de la mort un beau sourire

un instant m'interroge elle se tromperait

tant mon physique assez souvent prête à rire

samedi 4 mai 2024

Cataclysme

 


Ce qu'on nomme "l'Amour" est une escroquerie

la plus vaste et la pire aux relents de cadavres

et de ces morts-vivants quoi qu'un jour on en rie


Ne me reste un peu moins qui nous soit un bel havre

un jardin de l’Éden une ménagerie

de Noé l’arche ultime et le temps qui nous navre


Une lumière obscure est juste fascinante

elle est un phare étrange attirant nos regards

une douleur atroce et souvent lancinante

un viol inattendu venant sans crier gare


À chaque fois je suis dans mon effondrement

je pense à ta beauté qui s'éloigne de moi

la ruine de ma vie n'est pas sans fondements

Toi mon beau cataclysme et ses poussées d'émoi

vendredi 3 mai 2024

Hirondelle

 


Je voudrais inventer un langage absolu

compréhensible et fort et sans être traduit

qu'il soit dit rédigé décodé qu'il soit lu


La parole s’envole et le Verbe éconduit

l'enfer est un morceau de paradis perdu

rêver demain c'est déjà penser aujourd'hui


Je virevolte en vain pépiant sans pitié

ma main se pose en nuit couchante et délicate

où la dune est ton sein qui fait ma piété

pour ta beauté naturelle et sans silicates


Étant cet oiseau migrateur et sans foyer

je me cache du temps quand s’écoule le sable

et tant je mets d’écrits je me trouve effrayé

le bonheur est une hirondelle insaisissable